Dans un document de 22 pages, dont le journal Les 2 Rives a obtenu copie, le juge tranche de façon sans équivoque que « le travail à être effectué par la demanderesse [Champag] sur le site projeté est une activité de compostage, […] une méthode de traitement au sens du Règlement de zonage et […] un usage industriel ». Or, comme le terrain est zoné agricole, il est interdit pour une entreprise de s’implanter et d’offrir des activités industrielles.
« Nos citoyens sont très heureux et notre conseil aussi, commente le maire de Saint-Roch-de-Richelieu, Michel Beck. C’est une épine dans notre chaussure qui est enlevée. Ce n’était pas de la culture sur place et les matériaux ne viennent pas du site, ce n’est pas donc pas une activité agricole. Il y a toujours possibilité d’appel pour l’entreprise, mais le jugement est clair et sans équivoque; ça ferme la porte à l’implantation de l’usine dans la municipalité. »
Les pancartes « NON à l’usine de fumier » commencent d’ailleurs peu à peu à disparaître du paysage dans la municipalité. « J’ai retiré la mienne, mais je l’ai mise de côté. On ne sait pas s’il va y avoir un appel », conclut M. Beck, qui parle d’une victoire citoyenne.
Rappel du dossier
Deux points étaient débattus devant le juge Jean-Guy Dubois lors de l’audience des deux parties devant la Cour Supérieure, le 14 mai, au palais de justice de Sorel-Tracy : la réglementation de zonage en vigueur dans le secteur choisi pour l’implantation de l’entreprise ainsi que la nature des activités effectuées par l’entreprise à cet endroit.
Comme le site choisi par Champag sur la côte Saint-Jean était zoné agricole, l’entreprise devait prouver au juge que les activités prévues étaient agricoles et non industrielles. L’avocat de Champag a notamment plaidé, le 14 mai, que l’usine de Verchères et celle à implanter à Saint-Roch-de-Richelieu devaient être considérées comme une seule entité puisque la production de substrats aurait servi à celle des champignons.
Le juge n’a toutefois pas adhéré aux arguments de Champag, mais plutôt à ceux de la municipalité, qui plaidait qu’aucune culture de sol n’y serait effectuée. L’usine de Saint-Roch-de-Richelieu aurait servi à recevoir du fumier et de la paille afin de servir du compost pour l’usine de Verchères, ce qui est considéré comme une activité industrielle.
« En conséquence, en arrivant à la conclusion que les matières utilisées par la demanderesse [Champag] ne viennent pas de sa propre entreprise au sens de la définition «agriculture» et des décisions rendues par la Commission de protection du territoire agricole, on doit considérer que les activités de la demanderesse sont un processus d’assemblage, de traitement, de fabrication industrielle », écrit Jean-Guy Dubois dans sa décision.
Le directeur général de Champag, Agnesh Marsonia, n’a pas retourné l’appel du journal Les 2 Rives. On ignore donc si l’entreprise ira en appel de cette décision.
Chronologie du dossier |
– Mai 2017 : dépôt de la première demande de Champag |
– Juin 2017 : Saint-Roch-de-Richelieu refuse la demande de permis de l’entreprise |
– Juillet 2017 : dépôt d’une seconde demande avec une nouvelle option d’implantation de Champag |
– Mi-Juillet 2017 : la demande est à nouveau refusée par la municipalité qui soutient que celle-ci a déjà fait l’objet d’une analyse en mai. Champag envoie une mise en demeure afin que la municipalité lui délivre le permis demandé. Au même moment, une deuxième demande sur la deuxième option est déposée à la municipalité. |
– Août 2017 : Saint-Roch-de-Richelieu tente de moderniser son règlement de zonage afin de déterminer une zone pour les projets para-agricoles et industriels, mais en raison de la signature du registre par les citoyens, le projet est abandonné par le conseil. |
– Août 2017 à mai 2018 : le dossier est devant la Cour supérieure du Québec – juillet 2018 : le juge Jean-Guy Dubois donne raison à la municipalité de Saint-Roch-de-Richelieu. |