La grande erreur stratégique des 10 dernières années en matière d’urbanisme à Sorel-Tracy a été celle du TOUT au quai Catherine-Legardeur. Une situation que j’ai dénoncée publiquement à maintes reprises.
Avez-vous une idée, du combien nous a coûté depuis 10 ans, le développement du quai Catherine-Legardeur? Combien nous ont coûté et nous coûtent encore, Statera? Le bâtiment et le restaurant Les Années folles? Les Régates, trop souvent emportées par le vent? Le cirque des 7 doigts de la main de 2021 désormais oublié? L’éphémère scène musicale iO Expérience? Pas des centaines de milliers de dollars, mais des millions!
Je mets au défi le maire Patrick Péloquin de publier le bilan coût et bénéfice de ce TOUT au quai Catherine-Legardeur? Intuitivement, les coûts vont largement l’emporter, surtout lorsque viendra le temps de comptabiliser l’ampleur des opportunités perdues. Pensons au non-développement du centre-ville (ex. : inondations répétées au restaurant La Fougasse) ou à certains secteurs de Sorel-Tracy (ex. : tiers-mondisation du boulevard Saint-Louis) sans oublier les promesses pharaoniques de retombées économiques balayées par le vent du Saint-Laurent.
Rappelons que huit des neuf membres de l’actuel conseil municipal de Sorel-Tracy sont en place au moins depuis 2013. Ils sont donc responsables d’avoir laissé faire le maire destitué de Sorel-Tracy et ses acolytes avec leur stratégie catastrophique du TOUT au quai Catherine-Legardeur. Nous ne pouvons le passer sous silence en termes de responsabilité, dans un Québec adepte de l’impunité.
Comme si c’était le jour de la marmotte, nous nous dirigeons maintenant en matière d’urbanisme vers une autre grande erreur stratégique, mais pour les 10 prochaines années. Celle-ci trouve son origine dans la philosophie du nouveau PPU et particulièrement dans sa vision ainsi définie : « Le centre-ville de Sorel-Tracy : Un pôle urbain et un milieu de vie complet, rassembleur, vert et résilient, façonné par plus de 375 ans d’histoire et animé par une communauté dynamique, fière et solidaire. » En principe, un énoncé de vision est court, inspirant et il donne du sens comme point d’ancrage à l’ensemble d’un plan.
Ce n’est manifestement pas le cas avec ce libellé qui a été comparé à un « message publicitaire » par le journaliste Sylvain Rochon (Référence : CJSO, La Tribune, entrevue avec Patrick Péloquin et Frédérique Cloutier-Pichette, directrice du service de l’Urbanisme, 17 octobre 2023). Si je voulais être gentil, je dirais que c’est du « Bouillon de poulet pour l’âme ». Mais si je voulais utiliser une image péjorative, extrême et parlante, je dirais que ce PPU vise à transformer le centre-ville en quartier de la go-gauche granola à saveur écolo, sauce « wokisme » couleur Québec Solidaire.
Loin de moi l’idée de vouloir ignorer l’impact des changements climatiques, des îlots de chaleur, de la trop grande place de l’automobile dans nos vies, la poussière de Richardson ou de faire l’apologie des climatosceptiques. Mais ma vision du développement du Vieux-Sorel est plus celle associée aux populaires Quartier 10/30 à Brossard, Bourbon Street à La Nouvelle-Orléans ou au centre-ville de Trois-Rivières.
Ce PPU supporté par un document de plus de 90 pages fait les bons constats et propose des orientations porteuses, mais aboutit à une vision idéologique au détriment d’une autre, de nature utilitaire, c.-à-d. socio-économique. En ce sens, les puristes vous diront qu’un PPU doit se concentrer sur l’organisation et l’aménagement des espaces urbains en préservant l’environnement. Mais les pratico-pratiques contribuables (comme moi) vous diraient que ce PPU souffre de l’absence d’un volet « business ». C’est ce type de compétences qui nous manque à l’hôtel de ville. Tellement qu’au moment où l’on se parle, le centre-ville et plusieurs de ses commerçants sont en voie d’asphyxie, victimes des travaux majeurs effectués dans l’urgence d’avoir été reportés depuis 10 ans.
Le Vieux-Sorel doit (re)devenir un quartier dynamique où il se passe quelque chose à longueur d’année. Il doit être accessible tant par auto, moto (neige), vélo, à pied ou par le biais d’un quai à bateau au bout de la rue George. Un quartier qui nous mettra sur la « map » au lieu de nous noyer dans un grand tout lisse et sans saveur.
Rares sont les villes au Québec qui peuvent se vanter d’être assises sur un trésor enfoui sous leurs pieds, entre fleuve et rivière comme c’est le cas de notre quartier historique du Vieux-Sorel. Lequel repose sur une trame urbaine unique : la configuration en carré de nos rues qui remonte à l’influence britannique à partir de 1787. Il faut en prendre acte, c’est notre ADN.
J’encourage les membres du conseil municipal de Sorel-Tracy à s’engager dans une démarche systématique d’appropriation de ce PPU, afin d’en revoir la finalité et ainsi lui donner l’élan, l’esprit et la signature d’une ville ambitieuse et qui bouge, comme l’était l’excellent St-Thomas de nos souvenirs.
Jocelyn Daneau, Sorel-Tracy