20 mars 2024 - 07:00
Frappée par la COVID longue, elle veut amasser des fonds pour la recherche
Par : Jean-Philippe Morin

Julie Dutremble est atteinte de la COVID longue depuis près de deux ans et elle veut amasser des sous pour la recherche. Photo gracieuseté

Julie Dutremble et son conjoint Louis Blackburn, qui la supporte dans cette épreuve. Photo gracieuseté

Imaginez si vous ne deviez faire qu’une seule activité par jour. Par exemple, choisir entre faire un casse-tête, écouter une émission de télé ou prendre une douche. C’est la réalité à laquelle doit se contraindre depuis deux ans Julie Dutremble, atteinte de COVID longue, qui veut aujourd’hui amasser des fonds pour la recherche afin que plus personne ne soit dans la même position qu’elle.

Originaire de Sainte-Victoire-de-Sorel, mais vivant aujourd’hui à Saint-Bruno-de-Montarville, Julie Dutremble vit un enfer depuis qu’elle a été atteinte de la COVID, de façon pourtant asymptomatique, il y a deux ans. Ironiquement, son conjoint Louis Blackburn, également originaire de Sorel-Tracy, a eu la maladie de façon très forte en mars 2022 également, sans néanmoins avoir des symptômes pendant une longue période.

Mme Dutremble, pourtant vaccinée quatre fois avec le vaccin Moderna, a commencé à ressentir de premiers essoufflements anormaux en avril 2022, en allant marcher au mont Saint-Bruno. « Je devais m’arrêter dans les côtes pour reprendre mon souffle. J’étais très en forme auparavant et je marchais régulièrement », témoigne-t-elle.

Puis soudainement, en juin 2022, son corps et sa tête ont « crashé », image-t-elle. « Je ne suis pas rentrée au travail cette semaine-là. Je pensais faire une dépression. Je pleurais, mon cerveau était fatigué et je ne pouvais plus rien faire physiquement. Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. Mon médecin de famille parlait aussi d’une dépression, mais je n’avais aucune raison de l’être. Au bout de quelques mois, elle a refusé de continuer à signer mon arrêt de travail parce qu’elle disait que ma dépression devait être finie, que je devais sortir de chez moi. Mais j’en étais incapable! » insiste Mme Dutremble, qui s’est dite frustrée par le manque de connaissances des médecins face à ce phénomène.

La femme de 50 ans s’est donc tournée vers une clinique privée de Saint-Bruno. Dre Lyne Desautels l’a prise en charge à l’été 2023 en lui parlant de COVID longue. « J’ai commencé mes lectures sur le sujet et je me suis reconnue à 100 %. Enfin, de l’aide et de la compréhension! Une infirmière spécialisée me suit depuis ce temps aux trois mois. Je suis présentement à l’essai d’une médication qui pourrait éventuellement m’aider à retrouver une certaine énergie et une fonction cognitive meilleure, mais le processus est long et ça ne fonctionne pas pour tous. »

Des symptômes forts

Donc, depuis ce temps, Julie Dutremble doit dormir environ 12 heures par jour et choisir ses activités, sans quoi elle peut tomber en malaise post-effort, le principal symptôme de la maladie. « Ce qui implique de devoir être alitée plusieurs jours, sans bruit, sans lumière trop forte, à regarder les murs de ma chambre, dans le but de récupérer un minimum d’énergie », précise-t-elle.

Elle a aussi abandonné la lecture, elle ne peut plus conduire et elle ne peut même pas sortir et marcher jusque chez sa voisine. Aujourd’hui, sa vie sociale est à zéro. « Je ne peux plus recevoir de visite sans tomber en malaise post-effort. »

Auparavant designer intérieure, Mme Dutremble a dû arrêter de travailler en juin 2022 pendant un an, puis en juin 2023, elle a quitté son emploi après 24 ans de services. Elle n’a plus de revenu, autre que celui de son conjoint, qui la soutient à 100 % dans cette épreuve.

« Il s’occupe de tout. Mes deux filles de 20 et 22 ans sont présentes aussi et font de leur mieux. Mes meilleures amies me soutiennent par Messenger. Mes parents et mon frère aussi. Je suis bien entourée, mais comme je ne peux recevoir personne, l’isolement se fait quand même sentir », regrette-t-elle.

Des sous pour la recherche

Julie Dutremble insiste : la campagne de financement qu’elle a démarrée sur la plateforme GoFundMe, « Aidons la recherche sur la COVID longue », vise uniquement à trouver des fonds pour la recherche. Aucun sou ne lui revient.

« Depuis 2021, l’équipe de la Dre Liana Falcone est à la recherche de biomarqueurs qui pourraient constituer des cibles thérapeutiques/pronostiques. La COVID longue est une maladie complexe multi-systémique qui se démarque par une dysbiose (débalancement de la flore intestinale) et inflammation chronique du système nerveux. Le virus passe dans la circulation et va chercher tous les organes du corps. J’ai développé de l’arythmie, une hypothyroïdie, de l’apnée du sommeil, d’autres ont développé des douleurs musculaires et articulaires, des troubles respiratoires, etc. Les scientifiques sont en train de penser à traiter cette maladie par plusieurs voies et non une seule. Je souhaite de tout mon cœur qu’ils trouveront l’approche médicale appropriée », insiste-t-elle.

Jusqu’à maintenant, sa page a réussi à amasser près de 6000 $ pour l’Institut de recherches cliniques de Montréal. « Une amie et voisine y travaille fort tous les jours pour essayer de trouver une solution à la COVID longue. De la voir si impliquée amène en moi l’espoir qu’ils trouveront un jour. Je ne peux me résigner à mettre une croix sur mes rêves. J’essaie d’aider de cette façon, du fond de mon lit. Le nombre de personnes souffrant est grand et nécessite davantage d’attention. Que les gouvernements débloquent des fonds et s’impliquent. Que les médecins soient formés pour être capables de poser un diagnostic. Je me fais aujourd’hui porte-parole de tous ceux comme moi qui ont mis leur vie sur pause », conclut-elle.

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