18 juin 2024 - 08:29
Un patrimoine religieux appelé à disparaître
Les croix de chemin que l’on ne remarque plus
Par: Stéphane Fortier

En 2005, la croix Joyal à Saint-David a été restaurée et bénie par le curé de l’époque, Jean-Marie Brouillette. Photo gracieuseté Société d'histoire de Saint-David d'Yamaska.

Le calvaire de Yamaska demeure un trésor du patrimoine religieux au Québec. Photothèque | Les 2 Rives ©

La croix de chemin de Sorel-Tracy, angle Boulevard Gagné et rue des Sables, envahie par la végétation. Photo Stéphane Fortier | Les 2 Rives ©

Lorsqu’on parcourt les routes de la MRC de Pierre-De Saurel, roulant à 90 km/h, on ne remarque plus les croix de chemin le long des routes des zones rurales. Pourtant, elles revêtaient une si grande importance pour les agriculteurs au cours du 18e, 19e et une grande partie du 20e siècle.

Au fil du temps, ces trésors de notre patrimoine religieux sont, en grande partie, disparus. La plupart étaient faites de bois et à défaut d’entretien, elle se sont détériorées, effritées et se sont écroulées avec le temps. D’autres ont simplement été détruites par les propriétaires.
Des croix érigées plus récemment ont résisté et résistent encore aux rigueurs de nos hivers. D’autres ont eu la chance d’avoir de bonnes âmes pour les entretenir, comme c’est le cas du calvaire de Yamaska, un véritable petit trésor patrimonial, et les deux croix de Saint-David.

Pourquoi des croix?

Outre des raisons purement religieuses qui entraînaient l’érection d’une croix, on identifie diverses intentions qui expliquent la présence des croix de chemin. Sans doute la croix symbolique que Jacques Cartier a planté à Gaspé en 1534, indiquant la prise de possession d’une terre, qui a pavé la voie à toutes celles qui ont suivies. On l’appelle la croix de fondation. On retrouve ensuite la croix de dévotion publique, sans doute la plus classique. C’est la traditionnelle croix de chemin qui devient un lieu de rassemblement pour démontrer sa dévotion envers le Christ crucifié. « Beaucoup de croix de chemin ont été érigées par dévotion ou pour des faveurs obtenues. Ce sont des familles, pour la plupart, qui les érigeaient », nous dit André Breton, marguillier à la Fabrique de la paroisse Sainte-Victoire.
Il arrive que ces croix soient accompagnées d’une niche avec la figurine de la Vierge Marie ou Saint-Joseph. On remarque encore aujourd’hui, les croix commémoratives qui rappellent aux gens le site d’un événement, tragique ou heureux.

La croix de chemin simple peut tout simplement être constituée d’un poteau et traverse avec parfois des éléments décoratifs aux extrémités. La croix aux instruments de la passion que l’on peut remarquer dans notre région contient des objets symboliques comme la lance, l’éponge, le marteau, les clous, la couronne d’épines et parfois une échelle évoquant la descente du Christ de la croix. On y retrouve parfois le Sacré-Cœur (comme sur celle de Sorel-Tracy) et un coq ou une rose des vents au sommet.

Encore 16 croix?

Dans la MRC de Pierre-De Saurel, le site Web « Les Croix de chemin au Québec » en a recensé 16, dont deux sont disparues et une déménagée dans une autre région.

Ainsi, à Saint-Aimé, on y a recensé cinq croix de chemin et il en resterait maintenant trois.
À Saint-David, on en retrouve encore deux : la croix de la famille Arel et celle de la famille Joyal. Cette dernière entre dans la catégorie croix dite votive qui témoigne d’un vœu particulier. On peut planter la croix pour obtenir une faveur ou plus souvent on érige la croix pour une faveur obtenue. « Mon père l’avait érigée en 1945 pour faveur obtenue, se souvient Jean-Guy Joyal, celui qui a revampé la croix en 2005. Je me rappelle que lorsqu’arrivait le mois de Marie (mai), ma mère y allait pour réciter le chapelet. C’était un lieu de rassemblement pour y faire ses dévotions et les voisins venaient se recueillir devant la croix. J’étais enfant, mais je me souviens de tout cela. Les gens en profitaient pour faire du social. Ils s’échangeaient des nouvelles », relate M. Joyal.
De croix votive, la croix des Joyal est donc devenue une croix de dévotion publique. M. Joyal raconte que le curé de la paroisse de l’époque était venu la bénir. En 2005, Jean-Guy Joyal a refait la croix en se servant du socle d’origine. « C’est un héritage familial, en plus du fait que je sois croyant. C’est important pour moi », soutient Jean-Guy Joyal.

À Saint-Ours, sur les six croix de chemin répertoriées, seule la croix du rang Saint-Pierre est disparue. Il en resterait donc cinq. À Saint-Robert, une seule croix a subsisté, soit celle située sur le rang Saint-Thomas. Ce qui fait sa particularité, c’est que son intérieur est vide. À Saint-Roch-de-Richelieu, il en reste une et ce qui la particularise est la girouette et la niche contenant une statuette de la Vierge.
À Sainte-Victoire-de-Sorel, on en recensait une. Cette croix, aux dernières nouvelles, n’était plus visible, envahie qu’elle était par la végétation. Mais, à la connaissance d’André Breton, cette croix n’existerait plus.

Finalement, à Sorel-Tracy, on en a recensé une seule, soit celle située à l’intersection du boulevard Gagné et rue des Sables.

Un petit trésor maskoutain

À Yamaska, le Calvaire Albert-Mondou (calvaire parce qu’on y voir l’image du Christ) fait la fierté de la municipalité. Datant de 1838, ce calvaire rappelle un épisode de la rébellion de 1837. Il fut construit par Dominique Charland, patriote arrêté et emprisonné à Trois-Rivières. Il fit la promesse, s’il était délivré, de construire un calvaire. Acquitté, il tint promesse. La famille Charland a, depuis toujours, veillé à sa conservation. Alfred, son fils, l’a entretenu et, en 1908, Arthur, le fils d’Alfred, l’a fait réparer. Une pancarte mentionne le nom de tous ceux qui ont veillé à l’entretien du calvaire. Le calvaire a été déplacé à l’endroit actuel en 1922. Albert BB Mondou, qui a fait l’entretien du calvaire à partir de 1942, et ce, pendant plus de 60 ans avait remis le calvaire à la municipalité en juin 2005. Ce calvaire fait partie des 25 trésors du patrimoine religieux québécois.

Outre ce calvaire, la croix située au 45, rang du Bord-de-l’Eau Est a été déménagée à Notre-Dame-des-Neiges dans le Bas-Saint-Laurent. Il en resterait donc trois à Yamaska. En passant, il faut faire la distinction ici entre la croix de chemin et le calvaire qui représente le Christ en croix.

Les croix répertoriées dans la MRC Pierre-De Saurel

Saint-Aimé

Croix de Raymond Villard située au 520, rang Saint-Yves.
Croix de la famille Gamelin située au 153, rang Saint-Charles.
Croix située au 1365, rang du Bord-de-l’Eau (disparue).
Croix aux instruments de la passion située à l’intersection de la montée Sainte-Victoire et du rang Thiersant.
Croix située au 320, rang Saint-Thomas (disparue)

Saint-David

Croix Joyal située au 178, du 2e Rang.
Croix Arel située sur la rue Théroux près de la rue Principale.
Sainte-Victoire-de-Sorel
Croix située au 869, rang Prescott qui serait disparue aujourd’hui.

Yamaska

Calvaire Albert-Mondou situé au 172, route Centrale.
Croix située au 45, rang du Bord-de-l’Eau Est. Elle a été déménagée dans le Bas-Saint-Laurent en 2019.
Croix située sur le rang du Bois-de-Maska près de l’intersection du rang Grand-Chenal.
Croix située au 158, rang du Grand-Chenal.
Croix située face au 122, rang du Grand-Chenal.

Saint-Robert

Croix située au 473, rang Saint-Thomas.
Saint-Roch-de-Richelieu
Croix située au 785, côte Saint-Jean.

Saint-Ours

Croix située à l’intersection du rang Ruisseau-Nord et de la route de Michaudville.
Croix située au 2913, chemin des Patriotes.
Croix située au 2066, rang Saint-Pierre (disparue).
Croix de type simple située au 2455, chemin des Patriotes.
Croix de type simple située au 3188, chemin des Patriotes.
Croix de type simple située au 2126, chemin des Patriotes.

Sorel-Tracy

Croix située à l’intersection de la rue des Sables et du boulevard Gagné.
(Source : site Web des croix de chemin au Québec)

 

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