2 juillet 2024 - 08:46
Terres inondées après des pluies diluviennes
Un agriculteur perd des milliers de dollars en rendement
Par: Alexandre Brouillard

Quelques heures après les pluies diluviennes des 23 et 24 juin, 10 % des champs de Patrick Benoit étaient inondés. Photo Alexandre Brouillard | Les 2 Rives ©

Patrick Benoit devant l’un de ses champs inondés. Photo Alexandre Brouillard | Les 2 Rives ©

Les pluies diluviennes du 23 et 24 juin ont inondé 38 hectares de champs de l’agriculteur Patrick Benoit à Saint-Robert, soit 10 % de ses possessions. Désirant nettoyer et entretenir une section du cours d’eau problématique, l’agriculteur est menotté par les procédures du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs et perd quelques centaines de milliers de dollars en rendement alors que l’eau asphyxie ses plants.

Le 26 juin, notre journaliste s’est rendu chez Patrick Benoit pour constater l’ampleur des dégâts causés par le mauvais écoulement d’une section de la rivière Pot au Beurre située dans la baie de Lavallière.

L’agriculteur avait invité quatre personnes de la MRC de Pierre-De Saurel pour trouver une solution, dont le directeur général François Chalifour ainsi que le président du syndicat de l’UPA Richelieu-Yamaska, Yan Bussières.Rappelons que les MRC sont responsables de l’entretien des cours d’eau en milieu agricole depuis 2006.

En se promenant quelques minutes en tracteur dans les champs, on peut remarquer plusieurs hectares de champs inondés. Jusqu’à présent, en 2024, Patrick Benoit estime ses pertes à 35 000 $. Il révèle que la saison 2023 avait été encore plus désastreuse avec une perte d’environ 400 000 $.

« Ce n’est pas une situation facile, confie-t-il. Et c’est hors de mon contrôle. Depuis plusieurs années, on fait des efforts [dans le bassin versant de la rivière Pot au Beurre], mais là, on demande de l’aide au ministère. »

Après avoir installé quelques pompes pour retirer l’eau le plus rapidement possible, l’agriculteur était optimiste de voir l’eau être complètement retirée dans 72 prochaines heures. Mais le stress était toujours présent alors que plusieurs millimètres de pluie étaient prévus pour le samedi suivant (29 juin). « Je fais ce que je peux, mais quand l’eau atteint mes champs, je perds le contrôle », se désole M. Benoit.

Drainage et sédiments

Lorsque des pluies diluviennes surviennent, l’eau accumulée dans les différentes branches de la rivière Pot au Beurre se dirige vers les terres de Patrick Benoit, selon le phénomène naturel du bassin versant. Ainsi, selon M. Benoit, le cours d’eau devrait être nettoyé sur une distance de 650 mètres pour optimiser son drainage.

« Avec les 100 millimètres de pluie qui sont tombées les 23 et 24 juin, l’eau descend rapidement ici. Quand le cours d’eau est fermé, ça gonfle vite. Dès que l’eau trouve une porte de sortie vers les champs, elle les inonde avant de se rendre vers le lac Saint-Pierre », détaille M. Benoit.

Selon de récentes études, la section du cours d’eau problématique chez M. Benoit serait atrophiée par l’arrivée de sédiments qui descendraient le bassin versant vers le lac Saint-Pierre.

Une solution interdite

Selon toute vraisemblance, entretenir et nettoyer le cours d’eau sur une distance d’environ 650 mètres réglerait le problème. Toutefois, plusieurs obstacles se présentent à Patrick Benoit : l’endroit est situé en zone inondable 0-2 ans, certaines terres appartiennent à la Couronne [NDLR : à l’État] et une procédure du ministère de l’Environnement l’empêche de nettoyer ladite section.

« J’aimerais que le ministère donne le droit de nettoyer sur 650 mètres, sans brasser le cours d’eau au complet. Ce sera bon pour plusieurs années. La dernière fois que ç’a été nettoyé, c’est en 1981. Mais le ministère ne veut pas qu’on bouge la faune et la flore qui s’y trouve », explique Patrick Benoit.

Selon la procédure officielle relative à l’entretien de cours d’eau en milieu agricole du ministère de l’Environnement, les agriculteurs qui souhaitent entreprendre ces types de travaux doivent obtenir au préalable un certificat d’autorisation pour assurer le respect d’exigences environnementales.

« La Loi sur la qualité de l’environnement permet au ministère de délivrer une autorisation générale à une municipalité pour des travaux d’entretien de cours d’eau. Cette autorisation se veut moins contraignante et vise à offrir plus de flexibilité aux municipalités pour le type de travaux possibles. Dans le cadre d’une demande d’autorisation, il incombe au demandeur de démontrer la conformité législative et réglementaire ainsi que l’acceptabilité environnementale de son projet », explique Ghizlane Behdaoui du ministère de l’Environnement.

Finalement, selon le ministère, Patrick Benoit ne peut pas nettoyer 500 mètres du cours d’eau selon le « Règlement sur l’encadrement d’activités en fonction de leur impact sur l’environnement (REAFIE) ». « L’article 335 prévoit que seule une municipalité puisse soumettre une déclaration de conformité pour des travaux d’entretien d’un d’eau par curage. Ces travaux pourraient alors, sous réserve du respect des conditions d’admissibilité de l’article 335 du REAFIE et des articles applicables du Règlement sur les activités dans des milieux humides, hydriques et sensibles, être réalisés sur une distance ne dépassant pas 500 mètres », conclut le ministère de l’Environnement.

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