Journaliste : Bonjour madame la chaise!

Chaise : Tu veux une entrevue, c’est ça? Tu sais que je ne me serais pas mis à quatre pattes pour te le demander. Et puis, c’est moi la chaise et c’est toi qui a un dossier. Assez chargé, je dois dire. Les bras m’en sont tombés quand j’ai lu ça.

J : C’est mon métier de poser des questions. Peu importe ce que vous pensez, que voulez-vous que ça me fesse. Maintenant, c’est l’heure de vous mettre à table. On m’a dit que vous avez voulu vous lancer en politique?

C : J’étais en politique au fédéral, mais j’ai perdu mon siège. Et je me souviens que chaque fois qu’un élu faisait un discours, je me sentais interpelée. Dans les occasions spéciales, on servait des canapés. Trop petits pour s’asseoir, toutefois. Je servais la députée de Assisauga.

J : Elle commençait toujours ses discours en disant : Mes Chaises amis…? Ah! Ah! Ah! Et quand elle était en crise, tabouret de médicaments?

C : Et son conjoint, également député, était très paresseux.

J : C’était un lazy-boy finalement. Ah! Ah! Ah! J’imagine que ce que vous avez apprécié le plus, c’était les discours du trône?

C : Quand j’ai des temps morts, je repense à cette époque. Ça meuble… Je suis vernie d’avoir vécu ça. Il y a aussi des fois où je m’ennuie de mon papa.

J : Le Père-Lachaise. Il devait être plate comme un cimetière. Vous avez une position plutôt stagnante. Vous n’auriez pas voulu, je ne sais pas moi, être une belle voiture?

C : Être une chaise roulante? Ça m’aurait handicapée.

J : En décapée, vous voulez dire. On m’a dit que vous aimiez les films d’horreur.

C : J’ai beaucoup aimé Massacre à l’assis.

J : Et à la télé?

C : Je suis assez vieille, comme vous pouvez voir. J’aimais bien la famille Pouf dans le temps.

J : C’est la famille Plouffe!!! Et le sport?

C : J’ai déjà suivi attentivement le hockey. À l’époque où les Canadiens gagnaient la Coupe Stanley chaque année.

J : Quel était votre joueur de hockey favori? Divan Cournoyer? Ah! Ah! Ah! En tous cas, il ne jouait pas souvent sur le banc. Vous auriez aimé être autre chose qu’une chaise?

C : Avocate! J’aurais été membre du Barreau.

J : Ça ne vous a jamais tenté de prendre des vacances?

C : Et de m’enlever du poids sur les épaules? Il faudrait que je sois une chaise longue ou une chaise de patio.

J : Vous savez que vous avez des collègues qui tuent des humains.

C : Les chaises électriques. Jus suis au courant.

J : Des choses que vous appréciez moins?

C : Les prouts.

J : Pauv ti pet. Vous avez peur de l’avenir?

C : J’ai peur de tout ce qui est postérieur. J’ai aussi peur de la maladie, genre la bactérie mangeuse de chaise. À une certaine époque, j’aurais dit que j’avais peur de me retrouver dans un moulin à scie.

J : Un moulin assis? Une anecdote en terminant?

C : J’ai connu une famille au Mexique, et dans leur maison, on ne pouvait même pas s’asseoir. La famille Sanchez.

J : C’était la famille sans chaises, finalement? Votre devise?

C : Assis seulement on pouvait toujours se tenir debout…