18 mai 2016 - 00:00
A-t-on réellement un accent à Sorel-Tracy?
Par: Sarah-Eve Charland
Certains Sorelois ont un accent plus prononcé que d’autres. | TC Média - Julie Lambert

Certains Sorelois ont un accent plus prononcé que d’autres. | TC Média - Julie Lambert

Même si l’accent gaspésien ou saguenéen est beaucoup plus prononcé, un Sorelois peut facilement être reconnu pour ses expressions ou sa façon de prononcer certains mots. Quelques experts en linguistique se sont penchés sur la question.

Les particularités du parler des Sorelois se situent dans les diphtongues, croit l’ex-professeur en linguistique au Cégep de Sorel-Tracy, Michel Content.

« Ils allongent surtout les voyelles. C’est assez amusant de les entendre […] Le è se transforme aussi en aye. Par exemple, je vais à payeche (pêche) avec mon payere (père) », observe-t-il.

Malgré ces quelques caractéristiques, il estime qu’il n’y a pas beaucoup de différences entre le langage sorelois et celui du reste du Québec. « C’est assez homogène au Québec. Même à Montréal, on roule les R. »

Avant l’apparition des cégeps, les jeunes de la région devaient se rendre au collège classique à Saint-Hyacinthe pour poursuivre leurs études.

« Dans cette région et celles ayant aussi un collège, on retrouvait des gens de partout, ce qui faisait évoluer le langage. Pour ceux qui restaient dans les régions, les régionalismes évoluaient beaucoup plus lentement », croit-il.

La professeure et directrice du département de langue, linguistique et traduction à l’Université Laval, Marie-Hélène Côté définit deux régions distinctes au Québec: l’est et l’ouest, séparés par un axe (appelé isoglosse) traversant la province légèrement à l’est de Trois-Rivières.

La principale distinction entre ces deux régions est la façon de prononcer le R. « À l’est, c’est le R grasseyé (celui entendu le plus fréquemment) et à l’ouest, c’est le R qu’on pourrait appeler « roulé ». C’est une distinction qui date du Régime français », explique-t-elle.

Un accent peu présent

Marie Andrée Forget, du comité Pierre-de-Saurel français, dit ne pas être distraite par les accents du français parlé. « Je comprends très bien les gens, qu’ils viennent de la Gaspésie, des Îles-de-la-Madeleine ou du Lac-St-Jean. Je ne vois pas d’accent aussi spécifique propre à Sorel-Tracy. »

Ce qu’elle remarque surtout et déplore, poursuit-elle, c’est l’usage plus abondant du franglais, cette introduction de termes anglais pour désigner les choses. Une réalité à Sorel-Tracy aussi.

« Mais que les gens disent par exemple joual ou lieu de cheval, je trouve cela correct puisque c’est un mot français. »

Des origines françaises

Cette homogénéité du français québécois s’est instaurée très tôt au sein de la Nouvelle-France. Les colons provenaient surtout du nord-ouest, mais aussi de l’ouest de la France et de la région parisienne, explique la professeure et directrice du département de langue, linguistique et traduction à l’Université Laval, Marie-Hélène Côté.

Tous ne parlaient pas la même variété de Français, mais bien un patois. D’ailleurs, le français se parlait surtout à Paris et était même minoritaire en France avant 1757. Dans un désir d’unification du pays, l’État a rendu le français obligatoire dans les écoles en 1882.

« Il n’y a pas beaucoup de traces de ces langues régionales, ici. On en conclut que les colons parlaient français et probablement un patois, soutient Mme Côté. Certains d’entre eux étaient certainement bilingues. »

Avec la collaboration d’Ali Dostie et de Louise Grégoire-Racicot.

Quelques expressions soreloises relevées par nos internautes

– Rover : espionner

– Smat : une belle personne (normalement une personne gentille)

– Graff : un quartier moins fortuné

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