28 mars 2023 - 08:06
Capables?
Par: Louise Grégoire-Racicot

Depuis le début des années 80, Louise Grégoire-Racicot pose son regard sur la région comme journaliste à travers les pages du journal Les 2 Rives. Depuis février 2018, à titre de chroniqueuse, elle livre maintenant chaque semaine son opinion sur l'actualité régionale.

Ce qui pouvait arriver arriva! iO Expérience n’aura installé sa scène sur le quai Catherine-Legardeur que l’espace d’un été. La Ville ne veut renouveler son bail. Que comprendre?

Ses promoteurs, offusqués de ce refus, annoncent dans un communiqué non signé qu’ils déménageront leurs pénates dans une autre ville. Ils blâment Sorel-Tracy de ne pas avoir donné suite à une rencontre exploratoire pour discuter du bail qu’ils convoitaient. Ils déplorent qu’ils n’aient eu affaire qu’avec le directeur général qui leur a aussi communiqué par lettre le refus du conseil. Une procédure pourtant normale dans une administration municipale.

Ce communiqué a été suivi par un second, celui de la Corporation des Événements de Sorel-Tracy (ÉST) – organisme sans but lucratif qui a mis au monde iO Expérience et a décroché pour lui une aide financière de 150 000 $ de la MRC. Il y minimise ou conteste les éléments que lui reprochaient la Ville et a inspiré son refus. Comme le non-respect des ententes relatives au bruit, l’occupation du quai plus importante et longue que prévu, l’installation de barrières et blocs de béton autour du site, l’utilisation des panneaux électriques de la ville, la présence d’un camion de nourriture de rue et de loges temporaires sur le quai, etc. Des éléments qui contrevenaient à l’entente initiale. « Ils se sont appropriés le quai », a déploré le maire Patrick Péloquin.

Revoir la suite des événements permet de comprendre pourquoi le conseil veut clarifier ses relations avec iO. ÉST a vu le jour en octobre 2019 pour soit disant élargir l’offre culturelle soreloise. Puis au printemps 2022, elle lance iO – une entreprise privée dont le président est le fils de l’ex-maire – à qui l’ancien conseil louera cet espace. Une apparence de conflit d’intérêt.

C’est vrai qu’iO ne comportait pas de risque financier pour la Ville. Mais il lui a quand même coûté le report d’une subvention de 100 000 $ pour son nouveau terrain de soccer. Le conseil avait alors reproché à l’ex-maire son silence à la MRC quand fut attribué cet argent. Cela donnait aussi à penser qu’il avait incité sinon initié la formation d’ÉST non pour compléter, mais pour compétitionner avec des promoteurs culturels sorelois – dont le Gib Fest avec qui il avait eu maille à partir. Un ajout à l’apparence de conflit d’intérêt.

Oui, iO a pu favoriser la venue à Sorel-Tracy de 16 000 nouveaux visiteurs, selon ses dires, créant 46 emplois estivaux et générant 3,2 M$ en retombées économiques.

Mais une Ville ne peut pas pour autant permettre à un locataire de faire tout ce qu’il veut et comme il veut, surtout s’il occupe un espace public. Elle doit aussi tenir compte des besoins des citoyens voisins du site. Elle doit surtout travailler à ce que tous les organismes œuvrant dans les mêmes champs le fassent en concordance et équité, sans compétition malsaine.

Les règles ont-elles manqué de clarté? Sinon, ont-elles été suivies? Chaque partie a sa version. Ce pourquoi il sera difficile d’établir un nouveau terrain d’entente qui fera table rase des précédents et personnalités de chacun pour repartir à zéro ce dossier si mal engagé.

Cela exigerait une volonté des parties de défaire les nœuds, de rebâtir la confiance amochée, d’être capable de concessions, et ce, pour le meilleur de la région. Le pourront-elles?

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