On peut se demander, sans arrière-pensée, pourquoi le conseil ne l’a pas votée plus tôt cette résolution. De grandes entreprises américaines n’avaient-elles pas ouvert cette voie de boycottage de publicité en 2020 parce que fâchées des propos haineux qui y circulaient?
Heureusement, le dossier a évolué au pays. On a d’abord parlé d’impôts à acquitter. Et mieux encore – pour ne pas dire enfin – le fédéral a promulgué la loi C-18, qui impose qu’Instagram et Facebook, si elles affichent des liens vers des nouvelles, compensent financièrement cet « emprunt ».
Car ces géants du Web n’investissent pas eux-mêmes pour traiter l’information. Pourtant, ils font leurs choux gras du traitement rigoureux que font les journalistes – rémunérés par les médias locaux – de l’actualité qu’ils fouillent et rapportent. Ces travailleurs de l’information œuvrent au sein d’entreprises investies pour la plupart dans la vie économique et culturelle de leur milieu depuis des lunes.
Devant les menaces de non-publication d’informations canadiennes sur le Web, les élus priveront à leur tour ces réseaux des publicités qu’elles y achètent pour promouvoir à leur manière les décisions qu’elles prennent, les activités qu’elles tiennent.
On peut croire que cette décision soreloise est plus symbolique qu’autre chose, les élus ne spécifiant jamais quel budget ils y consacrent. Ce qui laisse croire qu’il est plutôt modeste. Comme elle peut ne sembler qu’administrative parce que les élus tiennent mordicus à ce que les entreprises payent la juste valeur pour les services utilisés.
J’y vois plutôt un appui moral aux médias locaux, ces témoins des événements régionaux. Une reconnaissance implicite de leur apport à la vie démocratique régionale. Même si le conseil n’apprécie certainement pas toujours ce dont un journal comme le nôtre peut traiter dans ses pages. Ou la façon dont il le fait. Il préférerait sûrement que l’on taise la maladresse de certaines décisions, la teneur de certaines critiques citoyennes. Mais il reconnait du fait même la liberté d’expression essentielle d’un média qui se préoccupe de faire circuler au plus grand nombre une information vraie, juste, vérifiée et honnête livrée par des journalistes soucieux de donner la parole à chaque partie concernée par une situation, une décision ou une déclaration. Leur éthique l’y oblige!
Ce faisant, le conseil vient aussi appuyer économiquement des entreprises du milieu qui ont pour mission d’informer de façon libre, indépendante et gratuite, tous leurs concitoyens.
Certains m’accuseront peut-être de prêcher pour ma paroisse. Ils n’auront pas tort. Car notre journal, comme d’autres, respectueux de ses lecteurs concitoyens et des personnes et organismes dont il rapporte les faits et gestes, a aussi été affecté par ces plateformes qui utilisent ses textes sans payer un sou. Ainsi attirent-elles, au fur et à mesure que leur lectorat ou nombre de clics augmentent, des annonceurs autrefois clients des médias locaux. Une menace à leur survie!
Reste à espérer que le conseil ralliera commerces et entreprises de la région à sa démarche et ainsi assumera son rôle de véritable force vive de la collectivité régionale.
Oui, le conseil a pris une décision judicieuse!