À lire aussi : notre dossier complet sur la laïcité dans le journal du 16 avril
Déjà, on ne récite plus depuis un bon moment la traditionnelle prière que les conseils plaçaient au point numéro 1 de l’ordre du jour de leurs rencontres publiques et qui consistait pour certains en un rapide « Esprit-Saint, éclairez nous! » répété trois fois avant de passer aux questions plus terre à terre de la gestion des affaires municipales avec tous les consensus et les différends qu’elle pouvait entrainer.
Ainsi le voulait la tradition : une affirmation claire de l’alliance Église – institution religieuse et expression de la foi – et État pour le salut des citoyens.
Mais que je sache, cette prière d’entrée n’a pas toujours bien inspiré les décideurs, ni commandé le respect, l’ouverture et l’attitude qu’elle devait faire prévaloir.
Le PQ avait ouvert la voie en abolissant la prière à l’Assemblée nationale en 1976, pour la remplacer par un moment de réflexion, par respect des non-chrétiens, a-t-on alors évoqué, confirmant du même coup le détachement progressif des Québécois de leur pratique religieuse ou adhésion pure et simple au catholicisme.
Puis en 2015, la Cour Suprême du Canada a même déterminé unanimement qu’il était interdit de prononcer une prière en début d’assemblée municipale. Devant la détermination du maire de Saguenay, Jean Tremblay, un fervent catholique, de prononcer une prière en début d’assemblée publique, le Mouvement laïc du Québec avait porté plainte plaidant que la prière était une atteinte à la liberté de religion des citoyens. La Cour réitérait ainsi la neutralité de l’État, institution publique ouverte à tous.
Règle générale, les élus de la région se sont soumis à ce jugement. Certains – dont celui de la MRC de Pierre de Saurel – ont choisi toutefois d’inscrire au premier point de l’ordre du jour des assemblées publiques, un moment de réflexion. Quelques secondes qui, à l’instar d’une clochette, appelle au silence, à l’arrêt des conversations entre élus et/ou citoyens.
Reste maintenant à trancher le sort des crucifix qui ornent encore les murs de plusieurs mairies et édifices publics de la région. Autre symbole de la chrétienté à l’heure où les Québécois ne forment plus un tout homogène judéo-chrétien. Certains sont restés de fidèles croyants et pratiquants. D’autres, dont je suis, sont désormais ou athées, ou agnostiques ou encore membres d’une autre confession. Voilà la réalité d’aujourd’hui. Ce pourquoi les symboles religieux n’ont plus leur place dans ces édifices.
Les élus doivent désormais reconnaitre le pluralisme religieux. Renoncer à conjuguer religion et politique. Éliminer l’impact que peut avoir la présence symbolique d’artefacts religieux dans leur institution laïque, surtout quand elles sont des lieux de décision, de dispense de services à tous ou de délibération publique municipale, scolaire, de justice ou autre.
Il ne faut surtout pas voir là le dénigrement d’une religion, ou la négation du crucifix par exemple, comme objet patrimonial.
Il faut surtout accepter la nécessité de replacer la religion à sa juste place, dans la sphère privée et dans les lieux de culte. Ainsi pratiquer la chose municipale dans un contexte et un environnement laïc, public et inclusif, quelles que soient les croyances de chacun et son appartenance ou pas à une religion ou à une autre!