30 octobre 2019 - 13:26
Des changements technologiques parfois nocifs
Des entreprises d’ici contraintes de fermer leurs portes
Par: Katy Desrosiers

La propriétaire et l'assistant-gérant de Photo Gariépy, Manon Prud'homme et Dany Berther, tiendront le fort jusqu'à la fermeture de la boutique. Photo Pascal Cournoyer | Les 2 Rives ©

Les changements technologiques nous simplifient souvent la vie, mais ils peuvent aussi impacter négativement des entreprises. Dans la région, certains commerces comme Photo Gariépy doivent fermer leurs portes, alors que d’autres, comme Steph Musik, doivent se réinventer pour survivre.

Photo Gariépy est dans le paysage sorelois depuis 60 ans. La propriétaire actuelle, Manon Prud’homme, a annoncé que la boutique fermerait ses portes sous peu.

« Avec l’arrivée du numérique, il a fallu s’adapter. Ç’a été difficile. Le développement, c’était notre vache à lait. […] Il y a aussi la vente d’appareils photo par internet. Les Amazon, Best Buy, ç’a joué beaucoup », explique Mme Prud’homme.

De plus en plus, les gens venaient en magasin pour des conseils et repartaient les mains vides afin d’acheter le produit désiré sur Internet. Les marges bénéficiaires très basses sur les produits vendus l’ont aussi poussée à tout arrêter.

« J’aurais continué si le reste avait été bon, si les gens faisaient toujours développer, agrandir des photographies, mais ça allait tellement difficilement. J’ai aussi perdu M. Gariépy et ma mère dans les trois dernières années. […] J’étais toute seule à gérer ça avec Dany (assistant-gérant à la boutique), je coupais ses heures parce que c’était moins rentable, je me sentais coupable donc je ne me prenais presque plus de salaire. Un moment donné, je me suis dit qu’il fallait que je pense à moi », ajoute la propriétaire.

Elle a tenté à plusieurs reprises de diversifier les services pour assurer la pérennité de l’entreprise, en proposant du matériel pour le scrapbooking et en revendant des meubles revalorisés. Après tout ce travail, elle se sent prête à relever d’autres défis. Elle s’intéressera toujours à la photographie, mais de façon plus personnelle.

Une industrie en changement

Manon Prud’homme a vu plusieurs commerces en photographie comme le sien fermer dans les dernières années. Par exemple, Lozeau, un fleuron dans le domaine, a été vendu à des intérêts ontariens.

Elle souhaite que la fermeture de son entreprise sensibilise les consommateurs locaux. « Si ça peut faire réfléchir les gens d’ici à l’importance de consommer localement. C’est un point qui revenait souvent dans nos analyses. C’est peut-être commun, mais c’est ce qui fait vivre une région », lance-t-elle.

Le propriétaire de Steph Musik et d’Audiotech sonorisation, Stéphane Béland, a choisi il y a près d’un an d’abandonner le commerce au détail pour se concentrer sur son entreprise en événementiel, son service de lutherie et la réparation de matériel électronique.

Dans une entrevue accordée au SorelTracy Magazine, il expliquait que le marché avait changé aussi pour la vente d’instruments de musique, de partitions et d’albums. Selon lui, les gens magasinent davantage sur le web les instruments, sans les essayer, et préfèrent télécharger la musique au format numérique. Les temps changent et il faut l’accepter, avait-il déclaré.

Prioriser les commerces locaux

Le directeur général de la Chambre de commerce et d’industrie de Sorel-Tracy, Sylvain Dupuis, est conscient que le contexte technologique a un grand impact les entreprises d’ici.

« Quand t’es prêt à attendre trois jours pour avoir un produit sur Amazon, je pense que tu es capable d’attendre trois jours chez un fournisseur local. Il faut se regarder le nombril un peu et se dire «Est-ce que je laisse le temps au fournisseur local de se virer de bord et de me le commander?» », souligne M. Dupuis.

Il explique que la concurrence du marché en ligne est presque déloyale, puisque les pignons sur rue doivent payer un local, des employés et des taxes, contrairement aux entreprises en ligne.

« Il faut que le gouvernement fédéral prenne ses responsabilités et oblige ceux qui sont en ligne de payer des taxes », ajoute-t-il.

Il explique aussi que ce sont les petites entreprises qui participent à la communauté et que des grosses entreprises, comme Amazon, ne financeront aucun projet communautaire.

Dans les derniers mois, d’autres commerces comme Chasse et pêche Sorel-Tracy, Dolce Design et Rial Électrique ont été contraints de fermer leurs portes. Il y a également le Golf Continental qui a dû être acheté par un nouveau propriétaire pour éviter la faillite.

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