3 octobre 2023 - 01:00
Entretien avec un journal
Par: Stéphane Fortier

Le journaliste Stéphane Fortier a déjà publié un livre rempli d’entrevues avec des objets. Il récidive en publiant un entretien humoristique avec un objet chaque deux semaines dans le journal Les 2 Rives. Photo Jean-Philippe Morin | Les 2 Rives ©

Chaque entreprise a ses employés un peu spéciaux. Le journal Les 2 Rives a la chance (ou la malchance) d’avoir dans son équipe un journaliste hors normes qui peut s’entretenir avec des choses aussi bien qu’avec des gens. En ce 45e anniversaire du journal Les 2 Rives, pourquoi ne pas demander à un journal de nous faire part de ses états d’âme?

Journaliste : Bonjour, cher journal. Mon Dieu, vous avez l’air d’avoir froid.

Journal : Normal. Je suis imprimé sur du papier glacé. Mais parle plus fort. Je suis un peu dur de la feuille de chou.

Journaliste : Vous avez un look moderne.

Journal : Pour un journal, c’est important d’être toujours à la page.

Journaliste : Vous avez déjà joué au volleyball, m’a-t-on dit.

Journal : Oui, et j’étais très bon dans les manchettes.

Journaliste : À une certaine époque, vous suiviez beaucoup le tennis.

Journal : En effet. Et j’aimais beaucoup la joueuse allemande Para Graff, là…

Journaliste : Steffi Graff, vous voulez dire?

Journal: Ouan, celle qui était en couple avec André Agassan.

Journaliste : En gastronomie, quel plat préférez-vous?

Journal : Un entrefilet mignon.

Journaliste : Et comme dessert?

Journal : Un feuilleté.

Journaliste : Et je suppose que votre animal favori, c’est le canard? On m’a dit que vous avez fait un petit voyage en Afrique du Nord.

Journal : Oui et tu sais que là-bas, il n’y a pas d’hebdomadaire, mais des heb-dromadaires, AH! AH! AH! Ils ont la bosse de l’information.

Journaliste : Très drôle. Vous avez déjà été marié, m’a-t-on dit.

Journal: Pour ton information (la pognes-tu?), je peux te répondre que oui et je peux aussi te dire de mon épouse qu’elle avait du caractère. Un gros caractère. Mais je ne l’avais jamais rencontrée avant. C’était une nouvelle. Mais je l’ai aimée. Je me suis tout de suite abonné et je me suis dit à l’époque : On se marie, ça Presse.

Journaliste : Quel genre c’était?

Journal : Le genre gazette.

Journaliste : Elle était anglaise?

Journal : Non. En papier, pourquoi?

Journaliste : J’ai pas dit en glaise….Ah! Pis oubliez ça. Comment l’avez-vous rencontrée? Par les petites annonces?

Journal : T’es un petit comique, toi. Non, dans un kiosque à journaux.

Journaliste : Et vous vous êtes séparés?

Journal : Oui. Et cela a été déchirant. Pour un journal, c’est une dure épreuve. Cela m’a toujours chiffonné.

Journaliste : Vous avez eu des enfants?

Journal : Oui et justement, ma petite dernière a fait une oTitre. C’est ce qui arrive quand on ne met pas son chapeau. Vignette qu’elle s’appelle et c’est pas une légende. Ça me rappelle que je viens de trouver le bas de Vignette qu’elle cherchait l’autre jour dans la sécheuse.

Journaliste : Je remarque que vous avez tendance à vous plier.

Journal : Depuis que le camelot a décidé de garrocher le journal sur le perron (ça se passait sur la rue Brique) j’ai des problèmes de dos. Je vais m’en souvenir de ce fils de pub.

Journaliste : De dos? Des problèmes de colonnes, j’imagine. Mais je suppose aussi que c’est périodique?

Journal : Ouin. Et heureusement, j’ai gardé de bons hebdominaux.

Journaliste : Et votre avenir?

Journal : J’espère ne pas finir dans un foyer ni dans une litière à chat ou de servir pour envelopper des fanes de carottes ou du poisson. Je pense plutôt à me recycler. Retourner aux études et faire mon bac… bleu de préférence.

Journaliste : Une anecdote en terminant?

Journal : Tu sais qu’un journal a accompli tout un exploit le 20 juillet 1969. Il a marché sur la Une.

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