12 mars 2024 - 08:34
Entretien avec un litre de lait
Par: Stéphane Fortier

Le journaliste Stéphane Fortier a déjà publié un livre rempli d’entrevues avec des objets. Il récidive en publiant un entretien humoristique avec un objet chaque deux semaines dans le journal Les 2 Rives. Photo Jean-Philippe Morin | Les 2 Rives ©

Le journaliste malade mental récidive avec ses folles entrevues en s’attardant à un litre de lait oublié sur le comptoir. Présentement en manque de sujets pour son journal, le scribouillard s’est dit qu’il pourrait montrer une fois pour toutes qu’il fait partie de la crème des journalistes.

Journaliste : Bonjour, Monsieur le litre de lait. Un petit café?

Litre de lait : Non, je n’ai pas le goût de me beigner ce matin. J’te r’garde, toi… Tu m’as l’air pas mal passé date avec tes cheveux blancs.

J : Pas autant que vous, ça a l’air. J’ai l’impression que vous venez de perdre votre emploi. On va être obligé de vous donner votre 4 %.

LL : Mon 3,25 %, tu veux dire. Chose certaine, j’ai gardé une certaine valeur. Actuellement, je suis pas mal plus cher que le litre d’essence.

J : D’où venez-vous?

LL : Je pourrais te répondre que je viens du frigidaire, mais c’est pas ça que tu veux savoir, han? Je suis issu d’une vache originaire de Beuharnois. Une fois sorti de l’étable, je me suis vraiment bidonné. Ça me rappelle, cette vache n’arrêtait pas de beugler pour un oui ou pour un non. Un moment, je me suis tanné et je lui ai dit de se traire. J’aurais dû lui faire un lavache de cer-veau. Mais j’aurais eu taure.

J : Vous vous êtes payé la traite! Ha! ha! ha! Parlez-moi de votre ex-conjointe.

LL : Mon ex était une crème, mais un peu froide, je dois dire.

J : C’était une crème glacée, finalement. Et on m’a dit qu’elle (Beatrice je crois qu’elle s’appelait) avait déjà fréquenté des gens du crème organisé. Ha! ha! ha!

LL : C’était pourtant une crème à qui on pouvait faire confiance.

J : Donc, c’était une crème sûre. Ha! ha! ha!

LL : T’es vraiment con, toi, hein? Je commence à regretter d’avoir accepté cette entrevue. T’es un peu trop nono à mon goût.

J : Avez-vous des enfants?

LL : Des garçons.

J : Combien ils sont vos garçons?

LL : Oh! Mes gars? 3.

J : Il semble que vous avez des doutes sur certains passages de la Bible. La nativité par exemple. Vous ne croyez pas qui lait né à Bethléem?

L : J’ai un problème avec les mages. C’était des faux mages.

J : Des faux mages de chèvre? Ah! Ah! Ah! Allons, ne vous fâchez pas. Cheese! Changement de propos. Vous êtes allé en vacances dans le Sud dernièrement?

LL : Effectivement. Qu’il lait cru? Euh! Qu’il l’eut cru. Je suis allé à Caillé Coco.

J : Cayo Coco, vous voulez dire?

LL : Ouan, quelque chose du genre.

J : Mais j’aurais pensé que vous auriez été vous détendre au Lac Tose. En passant, vous êtes devenu très ami avec une boîte de Corn Flakes. Vous lui avez même donné un petit nom.

LL : Oui. Quand je le vois, je lui crie : « Hé! C’est Réal. » On va souvent faire trempette ensemble, le matin surtout. Il porte toujours des Froot of the Loops. Ça me fait penser qu’un jour où je me promenais en panier d’épicerie, j’ai vu plein de boîtes de Kellogg éventrées sur les présentoirs. Je me suis dit que ça devait l’œuvre d’un céréale killer.

J : D’un serial killer, vous voulez dire? Vous aimez les livres, m’a-t-on dit.

LL : Les livres de beurre, surtout. Avec beaucoup d’humour gras.

J : J’ai lu qu’il y a une émission de télé que vous avez particulièrement appréciée à une certaine époque…

LL : Oh! Il y a longtemps. C’était Génisse en herbe.

J : Bra-veau! Outre les vaches, avez-vous des animaux favoris, genre laitopards?

LL : Pourquoi pas laitléphant? Épais!

J : Comment voyez-vous l’avenir?

LL : Je deviendrai probablement un fromage cheddar. Tant que je ne finis pas mes jours dans une poutine. Ça serait quelque sauce, remarquez. Chose certaine, je vais continuer à lutter pour la cause des Yogourts en Chine.

J : Ce sont les Ouïghours, plutôt. Eh bien, si, à votre mort, vous vous faites incinérer, vous pourrez toujours vous recycler comme lait en poudre. Ciao! Je m’en retourne à mon chalait. Et comme dirait un curé, Allaitluia!

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