9 Décembre 2024 - 08:32
Chronique humoristique
Entretien avec un sapin de Noël
Par: Stéphane Fortier

Photo freepik.com

Plusieurs sapins de Noël sont déjà installés, mais comme je me sens un peu seul en cette froide soirée de décembre, j’ai décidé de jaser avec l’un d’eux, exposé dans une vitrine d’un magasin d’un centre commercial, quitte à encore passer pour un tata complètement à côté de la plaque. C’est un risque, car je ne voudrais pas vivre mon prochain Noël à l’aile psychiatrique de l’Hôtel-Dieu.

Journaliste : Salut, mon beau sapin, roi des forêts.

Sapin de Noël : Tu m’niaises. J’suis dans une vitrine avec des cadeaux, ou plutôt des boîtes vides avec du papier d’emballage. Mais bon. Installe-toi. Un peu de bière d’épinette?

J : Merci. Avec une tranche de pin. COMMENT VOUS DÉCRIRIEZ-VOUS?

SN : Parle pas si fort. Je suis pas dur de la feuille comme les autres arbres, moi. Je dirais que je suis plutôt quelqu’un qui a du piquant.

J : On m’a dit que vous veniez de vous séparer d’avec votre conjointe. Sabine, je crois qu’elle s’appelait?

SN : Non, Sapine.

J : Qu’est-ce qui vous attiré chez elle? Ah! Je sens qu’il y a comme un mélèze ici…

SN : Non, non. Je trouvais qu’elle avait de belles boules.

J : De Noël, évidemment.

SN : Évidemment.

J : Vos relations devaient être épineuses, non?

SN : C’est vrai qu’elle était à pique. Il m’arrivait souvent de me faire enguirlander. Elle n’était pas toujours un cadeau. Un jour, elle est tombée malade et elle n’a jamais voulu aller à l’hôpital.

J : Elle avait peur des aiguilles? Ah! Ah! Ah! Mais encore?

SN : Elle n’avait d’un ange que ses cheveux. Parce que madame avait une étoile sur la tête, elle se prenait pour une star. Je te dis que pour un sapin de Noël, c’était pas une lumière.

J : C’était une conne… heu, une conifère, bien sûr.

SN : Mettons. Et puis, moi, elle me faisait toujours passer pour un illuminé. Je ne veux plus rien savoir de celui qui me l’a présenté, d’ailleurs.

J : Vous avez l’impression de vous être fait passer un sapin. Mais on m’a dit qu’elle vous concoctait de bons desserts…

SN : Ouais, des tartes aux pommes… de pin. Elle était forte pour ça, la cocotte.

J : Avez-vous une progéniture?

SN : Une fille et un gars. Résine pis Ned.

J : Pinède? Noël pour un sapin, c’est beaucoup de bouleaux. Auriez-vous aimé faire autre chose?

SN : Tu veux dire, changer de branche?

J : Être sapin de Noël dans les Forces Armées canadiennes, par exemple.

SN : C’est drôle que tu dises ça parce que tous les soldats souhaitent être décorés, un jour. Moi, je n’ai pas ce problème-là. En passant, savais-tu que mon arbre généalogique remontait à la préhistoire?

J : Vos ancêtres étaient des Homo Sapins? Ah! Ah! Ah!

SN : Non, ils ont vu le jour sur le boulevard Décoré à Montréal.

J : Heu! C’est pas le boulevard Décarie? Je vois que vous avez une télé dans votre vitrine.

SN : On est abonné à Vidéo-tronc. Ça me fait penser. Le propriétaire du magasin est un nommé Lépine et il se couchait toujours le soir sans se laver. On disait toujours de lui que Lépine dort sale.

J : Pas très bon pour le dos. Ah! Ah! Ah! Vous avez de la famille, ici?

SN : Pas de pruches parents, non.

J : Êtes-vous toujours planté dans un pot?

SN : Généralement oui, Burp! Pardon! Désolé, je digère.

J : Vous venez de faire un rapport d’in pôt. Comment voyez-vous votre avenir?

SN : Pas en planche, j’espère ou en cercueil, quoique, aujourd’hui, les cercueils… c’est plutôt Objectif l’urne de nos jours.

J : Bon, ben on doit se quitter, les gens commencent à me regarder bizarrement. À une prochaine fois vieille branche… et Joyaux Noël, comme dirait un bijoutier.

SN : Toi, aussi. Moi, Noël, je suis comme un cadeau. Ça m’emballe.

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