9 avril 2024 - 08:10
Chronique humoristique
Entretien avec une porte
Par: Stéphane Fortier

Photo freepik.com

Votre journaliste, qui possède maintenant sa propre chambre à l’hôpital psychiatrique, a décidé, cette fois, de jaser avec une porte, tout simplement. Celle de sa chambre d’hôpital, justement, qui est dotée de barreaux bien solides. Donc, ne craignez rien.

Porte : Tu veux m’interviewer? T’aurais pu cogner avant. T’es pas barré, toi.

Journaliste : Non et heureusement que vous ne l’êtes pas non plus. Vous êtes même plutôt ouverte, alors je me suis dit que je pourrais vous poser quelques questions.

P : Oui, je suis ouverte. L’ouverture, c’est la clé, mais pousse pas ta lock, ta lock, la poignes-tu? Je suis quelqu’un qui sort facilement de ses gonds et mon seuil de tolérance est plutôt bas.

J : Je me doutais que votre seuil était pas si haut (patio, la poignez-vous?). Je suis content d’avoir frappé à la bonne porte. J’avais peur que vous soyez un peu gênée.

P : C’est vrai qu’avant j’étais un peu poignée, mais plus maintenant.

J : Comment vous décririez-vous?

P : Je suis quelqu’un qui est persistante, je ne lâche jamais, je suis une battante…

J : Une porte battante? Ben coudonc.

P : Et j’ai bon œil…

J : Un œil magique. AH! AH! AH! S’susez. Vous semblez heureuse.

P : Je suis une sorte de porte-bonheur.

J : Vous aviez un conjoint, m’a-t-on dit?

P : Oui, mais il m’a claquée.

J : Plaquée vous voulez dire?

P : Pas quand on est une porte. Et j’ai ensuite jeté mon dévolu sur un doorman.

J : On m’a dit que vous aviez déjà été volée.

P : Oui c’est vrai.

J : Donc vous étiez une porte dérobée. Ah! Ah! Ah! Ah!

P : Très drôle, le clown. En passant, tu sais que plusieurs producteurs agricoles appellent leur ferme par leur nom comme Ferme Péloquin, Ferme Hubert ou Ferme Cournoyer. Imagine si le nom du producteur est Laporte…

J : Vous êtes très amie avec une fenêtre m’a-t-on dit.

P : Et elle n’a pas de misère à se trouver des chums. Elle a un si beau châssis. Je l’aime bien. Elle est transparente. Je me vois souvent à travers elle et c’est quelqu’un de réfléchi.

J : Avez-vous d’autres amies comme ça?

P : J’en ai connu une que je trouvais pas mal étourdie et elle avait toujours mal au cœur.

J : AH? Pourquoi donc?

P : C’était une porte tournante.

J : Auriez-vous aimé faire de la politique et être en campagne électorale?

P : Et faire du porte-à-porte? Non merci.

J : Qu’auriez-vous aimé être?

P : Peut-être une porte de cellule de prison, mais je ne suis pas membre du barreau. Ou encore faire partie des dirigeants d’une grande entreprise. J’aurais fait partie des cadres.

J : Des cadres de portes? Ah! Ah! Ah! Ce que vous êtes drôle. Vous aimez la musique?

P : Oui, surtout la musique des Doors, à une certaine époque.

J : C’est vrai qu’on peut déverrouiller une porte avec une carte de crédit?

P : Ça dépend du montant…

J : Des choses que vous appréciez moins?

P : Je n’aime pas les journées portes ouvertes. Ceux qui organisent ce genre d’événements en hiver se plaignent que leur facture de chauffage a augmenté, et l’été, ils chialent parce qu’il y a trop de mouches et de maringouins qui sont entrés.

J : J’ai entendu dire que vous aviez déjà consulté un psychologue.

P : Oui, et il avait une très bonne écoute.

J : Il écoutait aux portes, Ah! Ah! Ah!

P : (Soupir)

J : Bon, il ne me reste plus qu’à prendre la porte.

P : Toi, touche-moi pas!

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