30 avril 2024 - 08:01
La Porte du Passant transforme l’ancien restaurant L’Aquarelle en chambres pour itinérants
Par: Jean-Philippe Morin

La directrice générale de La Porte du Passant, Marie-Josée Averill et la superviseure clinique et chargée de projet volet itinérance, Alexandrine Boisvert, ont ouvert les portes du bâtiment à notre journaliste. Photo Jean-Philippe Morin | Les 2 Rives ©

L’ancien restaurant L’Aquarelle, situé à l’intersection des rues Charlotte et Élizabeth, aura une nouvelle vocation d’ici quelques semaines. L’organisme La Porte du Passant a loué l’endroit et mettra neuf chambres à la disposition d’itinérants afin de les amener vers une autonomie résidentielle.

Lorsque le propriétaire de la bâtisse, Michaël Ménard, a entrepris de reconvertir le bâtiment en chambres pour y loger des locataires, la directrice générale de La Porte du Passant, Marie-Josée Averill, l’a approché pour louer deux chambres.

« Finalement, l’opportunité s’est présentée pour qu’on fasse un projet pilote d’un an pour louer le bâtiment au complet et qu’on gère les neuf chambres avec des intervenants sur place. On a reçu une subvention début mars qu’on devait dépenser avant le 31 mars. Le timing était parfait. Les résidents qui voudront prendre un pas vers la stabilisation résidentielle vont pouvoir y loger le temps de trouver un logement », explique Mme Averill.

Lors de la visite de notre journaliste la semaine dernière, les travaux étaient bien avancés. On prévoit d’ailleurs accueillir les premiers résidents au début du mois de juin. Une conférence de presse est prévue le 23 mai prochain avec des dignitaires, dont le maire de Sorel-Tracy, des membres de la Table de concertation en itinérance Pierre-De Saurel et du Réseau Solidarité Itinérance du Québec (RSIQ).

Une premier pas vers l’autonomie résidentielle

Les résidents de ces chambres doivent être engagés dans le programme de Stabilité résidentielle avec accompagnement (SRA) de La Porte du Passant. L’organisme, qui a déjà une liste de noms potentiels, choisira les personnes qui auront ces chambres.

En 2016, l’organisme a reçu une subvention pour démarrer ce programme de SRA. Depuis, des centaines d’itinérants ont pu sortir de la rue grâce à un plan d’intervention bien défini et des intervenants pour les accompagner dans la démarche. « Il y a eu beaucoup de demandes et plusieurs réussites », se réjouit Mme Averill.

Durant la pandémie, en 2021, La Porte du Passant a offert de l’hébergement d’urgence en raison de trois nuits par semaine. Ce qui devait être un projet pilote temporaire est finalement devenu, trois ans plus tard, un refuge à sept jours par semaine avec les besoins grandissants.

« Entre le refuge et l’accès au logement, il manquait la période tampon. C’est difficile de passer de la rue à habiter dans un logement seul. C’est pourquoi le projet de maison composée de chambres est parfait. On va les amener tranquillement vers l’étape du logement », explique Marie-Josée Averill.

Les résidents devront payer un montant par mois en fonction de leurs revenus. Ils disposeront d’endroits communs dans le bâtiment, comme une cuisine et des toilettes. Un intervenant les suivra tout au long du processus avec un plan d’intervention. Puis, à seulement un coin de rue de là, sur la rue Phipps, ils peuvent retourner à La Porte du Passant pour socialiser.

L’enjeu se situe toutefois à l’accès au logement. « Normalement, on les garde de un à trois mois, sauf qu’on ne remet pas la personne à la rue si elle n’est pas capable de trouver un logement. En ce moment, c’est tellement difficile trouver quelque chose, ça bloque à ce niveau. Ce sera un défi », prévient la superviseure clinique et chargée de projet volet itinérance de La Porte du Passant, Alexandrine Boisvert.

Ces neuf chambres s’ajoutent donc aux trois logements « Nouveau départ » de type 3 1/2 que La Porte du Passant gère déjà. Ces logements, situés à Sorel-Tracy, ont la même mission, soit d’offrir un tremplin à l’usager vers une autonomie résidentielle.

De pire en pire

Chaque mois d’avril, La Porte du Passant calcule la fréquentation de son refuge lors d’une journée. Le 26 avril 2022, une seule personne était restée pour dormir. En avril 2023, cinq personnes ont dormi dans le refuge. Et le 23 avril 2024?

« On ferme à 15 h et on rouvre à 20 h. Donc à 20 h, 41 personnes attendaient à la porte, et 21 d’entre elles sont restées à coucher. C’est une augmentation exponentielle d’année en année », expose Mme Boisvert.

« On a une capacité de 12 lits. On voit les gens arriver avec un matelas gonflable emprunté parce qu’ici, ils ont accès à une douche, un café ou une soupe. C’est la réalité qu’on vit. On déborde. Un moment donné, on ne pourra pas accueillir 100 personnes, il va falloir que la société se ressaisisse. Que le gouvernement investisse massivement », ajoute Mme Averill.

La Table de concertation en itinérance Pierre-De Saurel vise une itinérance chronique zéro pour 2030. « On n’enrayera jamais l’itinérance, parce qu’il y aura toujours des phénomènes situationnels comme une séparation ou une sortie de prison, mais de l’itinérance chronique par manque de logements adaptés, on vise que ce soit à zéro en 2030 », conclut Alexandrine Boisvert.

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