Depuis déjà un mois, Marina occupe le poste de coordonnatrice de programme pour Tomorrow’s Youth, un organisme qui offre des services d’éducation psychosociale et de santé mentale aux communautés marginalisées et aux personnes en situation de refuge dans son centre situé à Naplouse dans le quartier de Khallet Al-Amood.
Rejointe par le journal la semaine dernière, la Soreloise se dit choyée de pouvoir venir en aide aux Palestiniens. « J’ai précisément étudié en développement international pour travailler dans des ONG [organisations non gouvernementales] de ce genre et pour venir en aide aux gens », confie-t-elle, à plus de 9000 kilomètres de son domicile.
Au quotidien, Marina aide surtout les enfants et les femmes qui vivent dans les trois camps de réfugiés situés aux abords de Naplouse, soit Balata, Asker et El Ain. Avec ses collègues, elles y interviennent, à la rencontre des familles, pour offrir de l’aide psychosociale et pour dispenser des cours d’appoint et des séminaires sur différents sujets. L’organisme estime que ce sont plus de 50 000 personnes qui vivent dans ces trois camps.
« Le terme réfugié a une autre dimension ici, nuance-t-elle. Plusieurs générations de gens ont vu leur maison détruite à cause de la guerre. Les Palestiniens sont donc pris ici depuis longtemps, dans ces camps permanents surpeuplés qui ressemblent à des quartiers très pauvres. »
Bien souvent marqués au fer rouge par les aléas de la guerre, bon nombre de réfugiés peinent à aider eux-mêmes les nouvelles générations de Palestiniens, faute d’aide et d’accompagnement adéquats. « C’est pourquoi on aide les parents pour qu’ils soient ensuite mieux outillés à aider leurs enfants. Les soins psychosociaux sont donc primordiaux pour que les plus jeunes ne trainent pas les traumatismes des autres générations », précise Marina avec conviction.
En territoire hostile
À Naplouse, Marine Pronovost se retrouve en plein territoire conflictuel. Située en Cisjordanie, à environ 50 kilomètres au nord de Jérusalem, cette ville sous l’Autorité palestinienne est l’un des théâtres du conflit israélo-palestinien qui perdure depuis 1948.
Ce conflit, qui oppose le nationalisme juif (sionisme) au nationalisme arabe palestinien, a pour principale cause la dispute de territoires.
« Je mentirais si je disais que je n’ai pas peur. L’occupation, on la voit et on la ressent. La nuit, j’entends parfois des tirs de fusil. Je ne suis pas habituée à cela en tant que Canadienne. C’est dérangeant. […] En réalité, j’ai seulement peur d’être au mauvais endroit au mauvais moment », explique-t-elle.
Selon l’Agence France-Presse, en 2022, le conflit a coûté la vie à plus de 200 Palestiniens et à 26 Israéliens. Depuis le début de la nouvelle année, ce sont 46 Palestiniens et neuf civils israéliens qui ont péri. D’ailleurs, le 7 février dernier, les forces israéliennes ont abattu un Palestinien de 17 ans lors d’un affrontement survenu durant un raid militaire à Naplouse.
« Récemment, j’ai eu peur que la situation dégénère et je pensais à la troisième Intifada, admet Marina. Mais je ne vis pas dans un quartier à risque, et ici, les paramètres de la guerre sont beaucoup plus subtils. »
Malgré la pauvreté et les atrocités vécues par les citoyens de Naplouse, Marina Pronovost est estomaquée par la résilience des Palestiniens. « Ils sont toujours de bonne humeur! Les gens continuent leur vie malgré le conflit et ils le comprennent, le conflit. Ils s’informent et ont accès à l’Internet. […] Dès leur plus jeune âge, les Palestiniens sont élevés avec un fort sentiment identitaire. Ils ont une profonde connaissance des enjeux géopolitiques », précise la jeune femme.
Briser les préjugés
Alors que ce conflit du Moyen-Orient peut sembler bien complexe aux yeux des Nord-Américains, la Soreloise souhaite briser les préjugés. « Ce sont seulement des humains comme nous. Partout sur Terre, il y a des communautés marginalisées. Ce n’est pas vrai que c’est seulement au Moyen-Orient. La marginalisation n’a pas de couleur ni de langue. »
D’ailleurs, à Tomorrow’s Youth, Marina Pronovost côtoie essentiellement des locaux, qui, selon ses dires, ont beaucoup à lui apprendre. « Ce sont des gens vraiment accueillants! Tout le monde me souhaite la bienvenue et me considère de leur famille. Ça leur donne de l’espoir de voir qu’une femme du Canada est venue expressément chez eux pour les aider », raconte-t-elle.
« Ici, les femmes m’impressionnent par leur force de caractère et leur intelligence, ajoute-t-elle avec enthousiasme. Elles sont de vrais modèles. En général, les gens sont très résilients ici. On ne peut pas être insensible à leur réalité, mais eux, ils se lèvent chaque matin avec le sourire au visage malgré les souffrances considérables. »
Après ce séjour de trois mois, Marina Pronovost prendra le chemin de Berlin, en Allemagne, pour rejoindre un nouvel organisme où elle s’intéressera aux bourses carbone. « J’ai l’ambition de travailler dans la sphère de l’aide internationale toute ma vie », conclut-elle avec beaucoup d’humilité.