L’ex-ambulancier a été condamné à trois ans et demi de prison en février 2017. L‘avocat de Demers, Günar Dubé, a souligné trois éléments pour expliquer sa requête aux juges Nicole Duval Hesler, Mark Schrager et Jean Bouchard. Il déplore qu’il n’y ait pas eu de procès séparés, que la preuve de faits similaires ait été utilisée pour soutenir les témoignages des victimes et que son client n’ait pas été cru.
« Le juge a utilisé les dossiers similaires comme un gouffre pour justifier l’ensemble des décisions qu’il a prises tout au long du procès. Il s’est livré à un concours de crédibilité. À ce moment-là, il a pris comme prémisse que l’accusé ment et de cette attitude, cela a créé un fardeau indu pour l’accusé, soit de lui demander de renverser la preuve établie par la poursuite. Par le fait même, cela a abaissé le fardeau de la preuve que la poursuite avait à établir », a-t-il expliqué.
Me Dubé a remis en cause les témoignages de certaines victimes, déploré le rejet de certains éléments mis en preuve par la défense ainsi que les critères utilisés par le juge lors du procès pour décider que les dossiers étaient similaires, ce qui aurait rehaussé la crédibilité des victimes, pense-t-il. Selon lui, ces éléments ont nui à ce que l’accusé ait un procès juste et équitable.
De son côté, le procureur de la Couronne, Me Maxime Hébrard, a soumis aux juges que la requête de l’avocat de M. Demers, soit de refaire le procès et de dire que le juge a erré, ne fait pas partie des moyens applicables à la Cour d’appel. Selon lui, l’avocat n’a pas fait la preuve qu’il y avait eu une erreur déterminante qui aurait causé un verdict différent.
« Ce que [l’avocat de la défense] espère ici, c’est de refaire l’exercice en appel en espérant que vous en arriviez à une conclusion différente de celle à laquelle le juge est arrivé. À notre avis, il n’y a pas vraiment erreur dans le jugement du juge », affirmé Me Hébrard.
Me Hébrard a insisté sur les compétences du magistrat qui est formé et entrainé à être capable de séparer les chefs d’accusation ainsi que de décider de la meilleure manière de les traiter. Il a soutenu que le juge avait raison de militer en faveur de la réunion des dossiers et qu’il n’y avait pas de possibilités de collusion entre les victimes puisqu’elles ne se connaissaient pas. Me Hébrard a aussi mentionné que la version des plaignantes, et particulièrement le modus operandi, militait en faveur de la mention de faits similaires puisque les gestes étaient de même nature, les stratagèmes de séduction étaient identiques tout comme les commentaires déplacés, les chatouillements et sa position d’autorité dans chaque cas.
Peine dans la collectivité
La longueur des procédures judiciaires, de juillet 2012 à octobre 2016, a aussi été soulevée. Selon l’avocat de Demers, il y a eu un délai de plus de 50 mois entre le dépôt des accusations de son client et son procès. Il impute les délais entre autres au report du procès par la Cour. Une date avait été choisie en mai 2017 puisque M. Demers ne pouvait être présent pendant cette période, car sa conjointe accouchait. La seule date offerte était en octobre.
De son côté, l’avocat de la Couronne a comptabilisé un délai de 23 mois et même en ajoutant certains autres délais mentionnés par Me Dubé, elle arrive en deçà de la limite du délai jugée déraisonnable de 30 mois de l’arrêt Jordan. Si la Cour d’appel décide que les délais sont déraisonnables, l’avocat de Claude Demers a demandé que la peine soit atténuée et à ce que l’accusé la purge dans la collectivité.
Les juges analyseront les requêtes dans les prochaines semaines et une décision sera rendue. Claude Demers a été remis en liberté depuis que sa cause est en procédure à la Cour d’appel.