27 avril 2023 - 07:00
Le berceau
Par: Louise Grégoire-Racicot

Depuis le début des années 80, Louise Grégoire-Racicot pose son regard sur la région comme journaliste à travers les pages du journal Les 2 Rives. Depuis février 2018, à titre de chroniqueuse, elle livre maintenant chaque semaine son opinion sur l'actualité régionale.

Je suis de la première vague des baby boomers. De cette génération dont on dit qu’elle a eu tout cuit dans la bouche. Pourtant, on a dû, pour se réaliser, couper court avec notre héritage. Réinventer un monde différent de celui qu’avaient connu nos parents. Spécialement dans la place qu’y occupent les femmes et la façon dont les familles vivent leur quotidien!

Bien sûr, la famille reste toujours au cœur des préoccupations des boomers. Elle constitue, pour la plupart d’entre nous, un pilier et un refuge. Un lieu privé où être fidèle à soi-même.

Mais la révolution tranquille, la diminution de l’influence religieuse, la libération des mœurs sexuelles et la prise de conscience des femmes quant au nombre d’enfants à mettre au monde et au rôle à jouer dans la société et au sein de la famille ont nécessairement poussé à changer le modus vivendi de cette dernière. L’adaptation a pris du temps et ne fut pas sans peine. Hélas, il reste encore bien des choses à changer, des négociations à mener, des consensus à arrêter.

Les boomers ont déjà limité les concessions et fait place à un plus libre choix pour ainsi moduler le monde selon leurs vision et ambitions. Lire La génération lyrique d’André Ricard en explique bien plusieurs facettes pas toujours glorieuses ou gagnantes, mais riches de bonnes intentions!

Chose certaine, les modèles pour ces nouveaux couples et familles étaient quasi inexistants. Il fallait réinventer le rôle des pères et mères, introduire un nouveau partage des tâches. Ce qui, pas toujours facile, a conséquemment entraîné des différends menant in extremis à de nombreuses séparations et divorces.

Ainsi, la constitution de la famille a rapidement évolué. À côté de la famille – que la tradition avait voulue nucléaire avec ses liens étroits et permanents de parents et enfants vivant sous le même toit – est apparue la famille monoparentale où une personne seule y vit avec des enfants. Aussi la famille reconstituée où les enfants nés d’unions précédentes cohabitent désormais avec ce nouveau couple, peu importe le sexe ou l’état civil des conjoints. Et plus récemment encore ces nouvelles familles où des enfants sont adoptés ou nés de femmes porteuses.

Les concepts de beau-père, belle-mère, frère et sœur se sont drôlement élargis. Et c’est bien ainsi. Plus de gens y trouvent probablement leur bonheur parce que la famille est plus librement consentie et vécue avec toutes les exigences qu’on attend toujours d’elle.

La principale est de taille. L’exigence que les enfants qui y grandissent y trouvent idéalement un cocon de bienveillance, de solidarité, de sociabilité et de réconfort dans l’amour et le soutien indispensables à leur développement et à leur équilibre.

Des défis attendent leurs parents. Dont l’importance de peaufiner leurs façons de communiquer et la capacité à les écouter sans juger. Ainsi doivent-ils ne jamais hésiter à consulter au besoin quand ils ne se sentent pas à la hauteur ou qu’un enfant n’arrive à s’y sentir intégré pleinement. Personne n’est parfait et ce n’est pas grave si on cherche à s’améliorer. Rien faire le serait. Car la famille a cette responsabilité de contribuer sa large part – via les mots et l’exemple – pour que ne disparaisse pas le Nous au profit du Je! C’est ainsi qu’elle restera le berceau d’un Québec aux racines profondes et fortes!

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