Je n’aime pas parler de ces situations, mais on doit l’admettre. Nous venons de perdre un fleuron pour la ville de Sorel-Tracy; la fermeture de l’Usine des poudres métalliques. La vie ne sera plus jamais la même.

L’impact est considérable et je suis bien placé pour analyser cette situation. En quelque sorte, je suis déjà passé par là.

Début des années 90, la région est solidement affectée par une crise économique. À ce moment, Sorel-Tracy se targue avec les hauts salaires qui y sont dispensés. Durant ma jeunesse, combien de fois les locaux se faisaient dire qu’ils étaient chanceux? On racontait que les Soreloises étaient les mieux habillées au Québec. Pourquoi? Les parents rapportaient de gros salaires à la maison, comparativement à une petite PME que l’on retrouvait dans les autres municipalités.

Il fut un temps où Sorel-Tracy était riche, justement à cause des nombreuses usines qui s’y étaient installées. Malheureusement, à cette époque, les autorités n’étaient pas vraiment conscientes du privilège qu’elles bénéficiaient. C’est là qu’il aurait fallu donner un élan à la ville. Or, ça, c’est une autre histoire.

J’avais perdu mon emploi au journal La Voix, pour lequel j’œuvrais depuis l’âge de 18 ans. Les usines fermaient, les gens n’avaient plus d’argent, ils n’achetaient plus, les commerces ne prenaient plus de publicité dans le journal; bref, il fallait faire des coupures. J’étais affecté aux sports. Je me retrouvais en tête de liste.

Et vlan! Pas le choix et je les comprenais.

Je me suis retrouvé sans emploi avec trois enfants à faire vivre. Je devais nécessairement me trouver du travail. Au début, je voyageais Sorel-Saint-Hubert à chaque jour pour y travailler dans un libre-service administré par Cyrille Labelle. Je gagnais un beau 5 $ de l’heure. J’ai accepté, car j’étais acculé au pied du mur.

Quelques mois plus tard, j’ai entendu parler que l’usine des Forges de Sorel engagerait du personnel. Je n’avais jamais déposé les pieds dans une usine. Je ne disposais pas du profil. Pourtant, cette usine m’a sauvé. J’y ai travaillé 25 ans.

Je me souviens lorsque j’ai reçu ma première paye. Je croyais qu’il y avait eu une erreur! Je n’avais pas l’habitude de gagner autant d’argent.

Voilà comment les employés des Poudres doivent se sentir présentement. Habitués à rouler à un certain rythme de vie, ils se retrouvent le cul sur la paille et devront se retrousser les manches afin de se relever de cette fermeture.

Il n’y a pas juste cet aspect. Travailler dans une usine, c’est comme être membre d’une grande famille. Les ouvriers passent plus de temps avec leurs compagnons de travail qu’avec leur propre femme!

Forcément, il se tisse des liens et là, tout va disparaître.

C’est vraiment triste et je peux imaginer ce qui se passe dans la tête de ces hommes et ce qu’il adviendra de ces familles.

Souvent, les suites n’annoncent pas le bonheur et j’avancerais même qu’elles sont parfois désastreuses.

Pour le moment, c’est l’impact, l’incompréhension, mais c’est lorsque la poussière retombera que l’on réalisera vraiment ce qui s’est passé.

Le régime de vie risque de baisser pour plusieurs personnes. La ville de Sorel-Tracy va perdre des familles qui ne seront plus en mesure de faire les paiements de leurs maisons.

Sorel-Tracy n’avait vraiment pas besoin de cette tuile qui vient de lui tomber sur la tête. On sentait un vent d’optimisme depuis quelques années, une renaissance, une certaine effervescence que l’on vient de tuer dans l’œuf.

Bonne chance aux travailleurs des « Poudres métalliques » et surtout, vous ne devez pas perdre le moral. Sachez que l’être humain possède des forces intérieures que la nature nous procure afin de remonter la pente dans de telles circonstances.

Courage.

Pour me rejoindre, commentaires, suggestions : danielmedaille@hotmail.com