Les Québécois sont de grands voyageurs. Combien de personnes connaissons-nous qui profitent de la semaine de relâche au primaire et au secondaire pour se rendre sur les plages du sud pour une petite cure de soleil? Combien de retraités de la région passent l’hiver dans le sud des États-Unis ou au Mexique? Puis, dans quelques mois, on verra les gens s’envoler pour la France, l’Italie ou le Portugal. Il n’y a rien de nouveau là-dedans. Ce n’est pas un phénomène récent.
Il y a aussi tous ces jeunes qui partent pour plusieurs mois travailler ou étudier tout en visitant l’Amérique latine, l’Afrique, l’Asie, l’Australie ou la Nouvelle-Zélande. Ils nous offrent souvent la chance de les suivre sur les réseaux sociaux. Ils nous font connaître des sociétés aux saveurs exotiques. Ils nous donnent envie de les suivre. Mais ça demeure bien loin de notre quotidien.
La région s’enrichit chaque année d’un nombre grandissant de personnes ayant des racines un peu partout dans le monde. L’équation s’est inversée. Ce n’est pas nous qui nous rapprochons de l’international, mais « l’international » qui s’intègre chez nous.
Ici même, dans la région, quand votre collègue de travail est d’origine ukrainienne, qu’il vous parle de membres de sa famille restés là-bas, de ses inquiétudes pour eux, ce premier anniversaire de l’invasion russe, si triste, prend tout à coup un autre sens. Le drame qu’il vous raconte, très personnel, prend une dimension que la nouvelle à la télé ne peut vous transmettre malgré les efforts des journalistes pour nous en expliquer la complexité.
Imaginez que votre voisin ait de la famille en Turquie, dans la zone qui vient de subir cet énorme et terrible tremblement de terre. Ce drame n’a tout à coup plus du tout la même signification, vous pouvez presque voir le visage des victimes et connaître leurs noms.
Au Québec, quand on parle d’immigration, on parle surtout de Montréal. C’est souvent abstrait et ça nous paraît bien loin. Le Québec rêve depuis plusieurs années de régionaliser l’immigration. Le phénomène est en marche, notre région peut en témoigner. C’est une bonne chose, car la régionalisation pourra contribuer à l’intégration à la société québécoise en faisant de chacun de nous des acteurs de l’accueil plutôt que des spectateurs anxieux.
Nos médias régionaux parlent de nous, partagent ce qui se vit ici, traitent de ce qui s’y passe. C’est leur mission.
En rendant normal de donner la parole à des gens qui vivent ici et qui sont en lien avec des pays étrangers, nos médias font simplement le constat que la région change et qu’il est pertinent de partager aussi ce qu’ils vivent.
Nos nouveaux voisins nous donnent un autre accès au monde, différent. Nous en sommes plus riches collectivement. C’est un constat intéressant. Et ce n’est que le début.