Au terme de trois phases, on verra donc 181 nouvelles maisons dans ce nouveau quartier, sans compter un immense parc de plus de trois millions de pieds carrés accessible pour le ski de fond, la raquette, le vélo ou la marche.
Mathieu-Jules Filion, président d’Invesco Habitation, est associé avec Alexandre Desjardins et le Saint-Oursois Benoit Legault pour ce projet. Il se dit sensible aux doléances des gens du quartier, mais il tient à les rassurer.
« On a fait l’acquisition de ce terrain qui était une zone d’habitation il y a huit ans, on avait une vision d’un projet novateur en harmonie avec la nature. C’est ce qu’on va faire. On est conscients que ce n’est jamais plaisant pour les voisins immédiats qui voient des maisons apparaître près de chez eux, mais on fera tout pour les accommoder. Les résidents vont pouvoir profiter du bois encore, mais un peu plus loin, puisqu’on a cédé 53 % de notre terrain à la Ville pour qu’elle fasse un parc et ça va devenir une zone protégée », souligne M. Filion.
« Je suis habitué à faire de tels projets dans le nord, j’en fais depuis 20 ans, poursuit le promoteur. On voyait le potentiel de ce terrain pour avoir un parc avec un modèle de ski in, ski out. Je ne suis pas du genre à tout raser et mettre un terrain de sable. Ce n’est pas le life style qu’on veut implanter au Refuge. On veut que ce soit un coin familial, boisé, avec des maisons aux allures de chalet. »
En effet, il n’y aura pas de maison modèle. Ce sera aux futurs propriétaires de lot de bâtir leur maison en suivant un guide d’architecture. Par exemple, les maisons devront avoir deux poutres, un minimum de pierres et une façade en bois massif. « Le guide sera sévère et le propriétaire devra nous fournir son plan de déboisement. On demandera aux propriétaires des terrains de conserver 50 % du couvert forestier. Donc, si on calcule les 53 % cédés à la Ville qui resteront forestiers à part pour les sentiers, le projet sera boisé à 75 %. Ce sera contrôlé et c’est en concordance avec la politique de l’arbre de la Ville », assure M. Filion.
Le projet en détails
La première phase de ce projet est déjà débutée et comptera 57 lots, en plus du prolongement de la rue de la Savane, de l’amorce de la rue Walter-S.-White et de l’aménagement de la rue Diogène-Caplette. Les promoteurs ont déjà obtenu quelques réservations.
Une deuxième phase de 81 terrains viendra compléter la Walter-S.-White et aménager la rue Joseph-Latraverse, ce qui amènera le Refuge des Patriotes à 138 terrains. Finalement, un autre promoteur, Construction Jean-François Nadeau, viendra prolonger la rue du Campagnard dans le cadre d’une troisième phase avec 43 lots supplémentaires, pour un total de 181 terrains.
Pour ce qui est du terrain cédé à la Ville, il s’agira d’un immense sentier qui fera une boucle, au bout du projet résidentiel. Le promoteur Mathieu-Jules Filion insiste beaucoup sur l’aspect ski in, ski out. « On a choisi de ne pas prolonger la rue des Sources au milieu, mais plutôt d’en faire un chemin vert. Un résident du secteur pourra donc prendre ses skis, emprunter le chemin et rejoindre le sentier Ville La Joie, qui existe déjà. L’été, ce sera une rue verte qu’on pourra marcher », souligne-t-il.
En moyenne, les terrains seront de 13 800 pieds carrés. Il y aura certes des terrains de 40 000 ou même 50 000 pieds carrés, mais aussi de 10 000 pieds carrés. Tous les lots seront raccordés aux égouts et à l’aqueduc aux frais des promoteurs. « Il y en a pour tous les goûts, que ce soit près du sentier vert, près du boisé ou dans un rond-point tranquille », assure M. Filion.
« On est très fier du produit final. Rien ne se compare aux projets de villes environnantes. C’est un projet réalisé en conformité et qui sera bénéfique pour les citoyens », conclut le promoteur.
« Nos opinions ne comptent pas du tout »
De nombreux citoyens du secteur des rues du Campagnard, des Sources et de la Savane sont fâchés de voir un projet immobilier arriver dans leur cour. Ils estiment ne pas avoir été informés adéquatement par la Ville de Sorel-Tracy et les promoteurs.
Une trentaine de citoyens se sont déplacés, le 16 avril dernier, à la caserne incendie de Sorel-Tracy pour une rencontre d’information à propos du Refuge des Patriotes. « C’est important de dire que c’était une rencontre d’information et non de consultation. Parce que nos opinions ne comptent pas du tout », s’insurge une résidente de la rue du Campagnard, Geneviève Gamache.
Même si la Ville de Sorel-Tracy et les promoteurs ont expliqué le projet de long en large, la plupart des citoyens, dont Mme Gamache, n’ont pas été convaincus. « On avait baissé notre garde parce que le projet avait été refusé en juillet 2023. On s’est dit qu’on serait correct et que s’il y avait une nouvelle tentative, on serait informé. C’est quand on a vu des rubans apparaître qu’on a appris que le projet était accepté. Tout a été fait en catimini et une rencontre a eu lieu parce qu’on l’a demandée », dénonce Geneviève Gamache.
Une résidente de la rue de la Savane, Julie Nadeau, est du même avis. « Quand on nous disait que ce n’était pas une zone prioritaire de développement en 2023, on s’est dit : fiou! Là, on se le fait imposer et on n’a pas le choix de dire oui. On avait l’impression que c’était : avalez votre pilule, ce sera ça », déplore-t-elle.
Les inquiétudes sont nombreuses dans le quartier, renchérit Geneviève Gamache. « On passe d’un cul-de-sac à une rue qui va accueillir près de 200 maisons, donc on ajoute près de 400 chars qui vont passer régulièrement dans le quartier. Ça m’inquiète aussi pour la qualité de l’air en général. La Ville installe des cabanes à moineaux pour le Jour de la Terre, il faudrait commencer par arrêter de couper des arbres. »
Julie Nadeau s’inquiète également de la circulation dans le quartier. « Les rues de la Savane et du Campagnard n’ont pas été conçues pour un volume routier de cette ampleur. Les rues ne sont vraiment pas larges. Là, on ajoute 181 portes pour deux voies d’accès seulement », explique celle qui habite depuis 18 ans dans le quartier.
De son côté, Geneviève Gamache y réside depuis sept ans et elle ne pense pas y rester. « Quand j’ai décidé de demeurer dans la région, j’ai choisi un endroit tranquille avec un cul-de-sac boisé. Je ne sais pas si je vais rester ici », conclut-elle.
Zone d’habitation
Le maire de Sorel-Tracy, Patrick Péloquin, était présent à cette séance avec une urbaniste de la Ville pour répondre aux questions des citoyens. S’il dit comprendre leur réaction, il admet ne pas avoir eu le choix.
« Les promoteurs ont tout fait dans la légalité. C’est un terrain zoné habitation. Au niveau municipal, on a très peu d’outils pour empêcher un tel projet. On veut du développement résidentiel, mais encadré et c’est ce qu’on a fait. Si la Ville avait voulu empêcher le projet, il aurait fallu payer, au promoteur, le coût du projet, soit 36 M$ en plus de la valeur du terrain. À la place, on a choisi de bien encadrer le projet », explique-t-il.
Selon le maire, le schéma d’aménagement de la MRC de Pierre-De Saurel, qui date de 1989, mais qui est présentement en voie d’être renouvelé, rend la tâche plus compliquée au niveau des zones d’habitation. De plus, lorsque le projet a été refusé en juillet 2023, le maire avait mentionné, en réponse au promoteur dans une séance publique du conseil, que le projet n’était pas situé dans une zone prioritaire de développement.
« C’était vrai à ce moment, mais il y a deux ans, on n’était pas rendus à 2700 portes de plus au niveau des projets immobiliers. Aujourd’hui, on est rendu là. Nos zones d’habitation se remplissent et on développe dans nos zones de réserve de développement. Je comprends les résidents, mais c’est un projet conforme et on a accompagné le promoteur. Par exemple, le projet a été modifié et il ne sera pas sur fosse septique, ce qui aurait demandé plus d’arbres coupés. Les terrains sont branchés sur les services et en plus, on aura 53 % qui deviendra une zone protégée », conclut le maire.
Rappelons que la demande initiale était d’implanter 89 habitations sur des terrains partiellement desservis par l’aqueduc, en plus d’un projet intégré multifamilial de 40 logements.