Rappelons que Serge Péloquin avait été déclaré inhabile à exercer ses fonctions en juin 2022 par la Commission municipale du Québec (CMQ) après avoir posé un dispositif électronique d’écoute dans le bureau du greffier. Une élection partielle avait eu lieu à l’automne pour le remplacer à la mairie.
Parallèlement, l’enquête de l’Unité permanente anti-corruption (UPAC) était toujours en cours et s’est conclue au cours des derniers jours, confirme le porte-parole du corps policier, Mathieu Galarneau. « Notre enquête tend à démontrer qu’il aurait effectué de l’écoute clandestine du greffier de la Ville de Sorel-Tracy, alors qu’il était maire de la municipalité », indique-t-il par courriel.
Le Directeur des poursuite criminelles et pénales (DPCP) a par la suite déposé des accusations, confirme à son tour sa Procureure en chef adjointe par intérim de la Direction des communications du DPCP, Audrey Roy-Cloutier. « Après avoir analysé le dossier soumis à notre attention, des accusations d’abus de confiance et d’interception de communications privées ont été déposées à l’égard de Serge Péloquin », écrit-elle.
Selon la sommation remise à Serge Péloquin le vendredi 21 juillet dernier, dont le journal a obtenu copie, les deux chefs d’accusation se lisent comme suit :
« Entre le 7 novembre 2020 et le 12 avril 2022, à Sorel-Tracy, district de Richelieu, au moyen d’un dispositif électromagnétique, acoustique, mécanique ou autre, à savoir : une caméra, a sciemment intercepté des communications privées, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 184(1)a) du Code criminel. »
« Entre le 7 novembre 2020 et le 12 avril 2022, à Sorel-Tracy, district de Richelieu, a, étant fonctionnaire, commis un abus de confiance relativement aux fonctions de sa charge en rapport avec l’interception de communications privées, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 122a) du Code criminel. »
Ne manquez pas le journal du mardi 1er août afin de lire toutes les réactions obtenues sur cette nouvelle de dernière heure.
Chronologie des événements
9 novembre 2020 : Serge Péloquin installe un dispositif électronique dans son propre bureau pour y enregistrer des rencontres et appels jusqu’au lendemain.
10 novembre 2020 : Serge Péloquin installe le même dispositif dans le bureau du greffier René Chevalier, au-dessus de sa bibliothèque. Il peut enregistrer toutes ses conversations à l’aide de son cellulaire.
7 avril 2022 : René Chevalier découvre le dispositif au-dessus de sa bibliothèque et le débranche.
8 avril 2022 : René Chevalier informe le directeur général de la Ville, Carlo Fleury, de sa découverte.
9 avril 2022 : René Chevalier réinstalle l’appareil électronique à l’endroit où il l’avait découvert.
11 avril 2022 : Serge Péloquin demande au directeur général de préparer les « chiffres de retraite » du greffier et de préparer un projet d’entente le concernant. Il admet à ce moment au DG avoir posé un dispositif électronique en vertu de l’article 52 de la Loi sur les cités et villes.
19 avril 2022 : Après la séance du conseil, René Chevalier informe les conseillers de sa découverte. Les conseillers, qui n’étaient pas au courant, demandent qui a posé ce geste. Le directeur général pointe Serge Péloquin. Ce dernier suspend René Chevalier sans solde en vertu de l’article 52 de la Loi sur les cités et villes. Une enquête est alors ouverte à la Commission municipale du Québec (CMQ) et à la Sûreté du Québec (SQ).
2 mai 2022 : Lors de la séance du conseil de ville, sept des huit conseillers effectuent un vote de non-confiance envers Serge Péloquin et un vote de confiance envers les employés, chez qui l’inquiétude règne. Le greffier René Chevalier est réintégré dans ses fonctions.
3 mai 2022 : René Chevalier est accueilli de façon triomphale par les employés à l’hôtel de ville. Une séance extraordinaire a lieu le soir-même dans une ambiance tendue.
5 mai 2022 : L’Unité permanente anti-corruption (UPAC) prend en charge l’enquête criminelle des mains de la SQ.
6 mai 2022 : L’UPAC mène une perquisition à la résidence de Serge Péloquin.
24 mai 2022 : La CMQ conclut son enquête et dépose une action en inhabilité d’un an envers Serge Péloquin afin qu’il soit destitué de son poste de maire. Elle juge que ses gestes constituent une atteinte sérieuse à l’honneur et à la dignité de la fonction d’élu municipal. Serge Péloquin signe un acte d’acquiescement total à la demande, acceptant ainsi les conséquences de ses actes et ce que recommande la CMQ, soit d’être déclaré inhabile à siéger pour un an. Il veut rester en poste jusqu’au jugement devant la Cour supérieure le 8 juin.
8 juin 2022 : Le juge Steve J. Reimnitz accueille l’action en déclaration d’inhabilité et destitue Serge Péloquin. Ce dernier affirme toutefois disposer de 30 jours et démissionner le 7 juillet.
20 novembre 2022 : Patrick Péloquin, qui était conseiller municipal, est élu maire de Sorel-Tracy à la suite d’une élection partielle.
21 juillet 2023 : L’UPAC conclut son enquête et le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) somme Serge Péloquin de se présenter au palais de justice de Sorel-Tracy le 28 août prochain. Il comparaîtra sous deux chefs d’accusation du Code criminel, soit interception illégale de communications privées et abus de confiance.