Bien qu’elle et son conjoint ont les papiers qui confirment qu’ils sont guéris du coronavirus, ils n’ont pas hésité à se mettre en isolement pour 14 jours à leur retour à la maison après avoir passé dans quatre aéroports et pris trois avions. Même leur garçon de 23 ans a dû se trouver un autre endroit où rester.
Bien qu’ils s’accordent quelques marches de santé, ils changent de trottoir dès qu’ils voient quelqu’un en sens inverse. Pas question non plus pour eux d’entrer en contact avec qui que ce soit pour le moment pour ne pas contaminer leurs proches.
Après s’être accordé quelques jours de répit, le couple chéri du Québec a accordé des entrevues à plusieurs médias nationaux, dont Drainville PM, sur le réseau Cogeco, à Denis Lévesque à LCN et Tout un matin, à Radio-Canada Première, pour alerter la population de ce qu’ils ont vu en Asie.
Ils ne comprennent pas pourquoi les cas confirmés de la COVID-19 ne sont pas tous hospitalisés. « Ça me fait capoter. Moi, j’étais négative, je n’avais aucun symptôme et j’ai été obligée d’aller dans un hôpital spécialisé, faisait remarquer Manon Trudel, lorsque jointe à son domicile vendredi dernier. Ils sont où ce monde-là? Qu’est-ce qui se passe avec ces gens-là? »
« Quand t’es négatif, tu peux le donner, même si tu n’es pas malade. Imaginez un positif, fait-elle valoir. Est-ce que tous les gens qui sont en quarantaine à la maison vont dire à leur conjoint(e), enfants, petits-enfants, on te met dehors? Je ne pense pas. Nous, on l’a fait parce qu’on est assez hallucinés par ce qui se passe, mais penses-tu qu’il y a beaucoup de monde qui font ça? Il y en a 2400 qui sont en attente de résultats. Ces 2400-là se promènent-ils dans la nature? »
Elle déplore également que les gens continuent d’aller faire la file à la SAQ, pendant que plusieurs commerces ferment leurs portes en raison des mesures annoncées par le gouvernement. « On essaie de passer des messages aux gens pour leur dire de ne pas paniquer, mais ce qu’on dit au gouvernement c’est : on attend combien de morts pour allumer? Ça nous inquiète beaucoup. Probablement que ce qu’on a vécu a fait qu’on a un niveau de sensibilité aigu. On a vu des choses affreuses. On ne veut pas que d’autres gens vivent des choses de même. »
Des ondes positives
Pour le moment, l’enseignante en santé et sécurité au Cégep de Sorel-Tracy ne sait pas encore si elle sera de retour à son poste, elle qui était en congé sans solde au moment d’embarquer sur le Diamond Princess. « Parce que d’abord, depuis deux ans, j’enseignais juste durant l’automne et je voyageais durant l’hiver. Ensuite, ce n’est pas facile ce que nous avons vécu et parfois, ça remet en question certaines choses », explique-t-elle.
Toute cette aventure l’aura tout de même fait grandir comme enseignante, nous a-t-elle confié. « Je ne suis pas anxieuse de nature, mais mes étudiants le sont souvent pour leurs résultats d’examens. Je ne comprenais pas vraiment pourquoi. Je le comprends plus, maintenant. Parce qu’avec les examens de santé que nous avions, mon niveau d’anxiété augmentait. Si j’y retourne, je serai une meilleure prof. Parce que je vais comprendre mieux leur anxiété », a-t-elle souligné.
Par ailleurs, Manon Trudel a voulu remercier tous ceux qui ont pensé à eux tout au long de leur mésaventure au Japon. Ce qui leur a permis de se sentir beaucoup moins seuls, à l’autre bout du monde. « Tu ne peux même pas t’imaginer à quel point ç’a été précieux », lance-t-elle.