31 octobre 2023 - 08:39
[OPINION DU LECTEUR] Expansion de nouveaux ports : pas à Contrecœur, ailleurs, plus petits, moins polluants
Par: Deux Rives

L’article du 17 octobre du journal Les 2 Rives arrive juste après les statistiques récentes de l’Administration portuaire de Montréal (APM) : elles montrent que le volume de conteneurs traités à Montréal est en déclin malgré la reprise après COVID. C’est le vice-président, Guillaume Brossard, d’APM, qui l’affirme : « 13% de moins de janvier à juillet ». Si, comme c’est probable, « la tendance se maintient », l’affirmation doit être corrigée : Jusqu’à tout récemment, « les installations actuelles du Port de Montréal [semblaient] arriver à pleine capacité ». Dorénavant, c’est faux.

Pourquoi? Depuis l’inauguration de la Voie maritime en 1956, les deux autres canaux maritimes ont été considérablement agrandis : plus de quatre fois pour Suez! Les gabarits laurentiens, eux, sont restés inchangés. Exactement comme si, à la montée Lapierre, il n’y avait pas l’autoroute 30 (Suez…) mais seulement l’ancienne courbe raide qui y a été rectifiée : n’y circulaient à l’époque que des camions six roues alors qu’aujourd’hui, le trafic peut se faire par convoi articulé.

Or les gigantesques Post-Panamax et Post-Suez, qui ne peuvent emprunter les canaux, doivent faire le tour par les océans. Montréal n’est plus dans le coup et, au pays, c’est Halifax et Vancouver qui accueilleront les nouveaux monstres : on ne peut augmenter la capacité des véhicules – quels qu’ils soient – sans que les voies et les installations de manutention suivent. L’inverse est tout aussi vrai : augmenter la capacité du Port à Contrecœur n’a guère de sens puisque le fleuve a atteint son gabarit maximal (ne serait-ce qu’à cause du tirant d’air sous les ponts).

Deux réalisations de chez nous confirment une nouvelle vocation du fleuve.

1 – Depuis au moins une décennie, le transport pétrolier n’a cessé de croître sur le Saint-Laurent. L’augmentation est due non seulement à la demande, mais aussi à l’offre : depuis que les silos d’Hydro-Québec ont été récupérés par Kildair, le terminal Sprague de Tracy, « l’un des plus grands terminaux de mazout lourd, [etc.] de classe mondiale », connaît un trafic soutenu de pétroliers de taille moyenne et plus. Il en découle un « cabotage de fleuve » de plus en plus intense.

2 – Juste à côté, sur les fondations de l’ancienne centrale thermique, vient d’être inauguré le terminal de manutention multimodal. Décriée par certains, cette installation est, au contraire, visionnaire. Et soutenue par les faits : les observateurs de notre fleuve auront remarqué l’augmentation fulgurante, cette année, des barges poussées grand format. Largement utilisées pour la construction et la démolition des ponts Champlain, certaines unités pleine longueur bien adaptées à notre échelle sillonnent aujourd’hui le Saint-Laurent. Pour se développer, ce mode d’avenir aux impacts environnementaux les plus réduits a besoin d’un réseau bien implanté de terminaux multimodaux des Grands Lacs jusqu’au Golfe.

Conclusion : après le rêve raté de la Voie maritime (raté, parce le Seawaymax est au gabarit du dernier canal Welland de 1932, et non celui du Panama de l’époque…), le Saint-Laurent est sur le point de retrouver sa pleine vocation : combiner une navigation de type maritime (celle qui est en déclin) avec un gabarit fluvial en plein développement. C’est dans d’autres terminaux multimodaux comme celui – avant-gardiste – de Tracy, que les gouvernements doivent investir. Pas dans l’extension du Port à Contrecœur.

Joseph A. Soltész, Contrecœur

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