Dès les années 1980, une évaluation approfondie a été menée par des gestionnaires visionnaires pour identifier les emplacements les plus stratégiques pour le Saint-Laurent. Contrecœur est alors apparue comme le choix naturel. Le site combinait et combine toujours plusieurs atouts uniques : un zonage industriel, une proximité avec les entreprises manufacturières, une autoroute, une connexion ferroviaire, ainsi qu’un accès à un chenal de navigation existant. Cela permet donc de miser sur ce qui existe déjà.
Répondre aux besoins de nos entrepreneurs
L’expansion du Port de Montréal est une réponse concrète aux besoins de nos entreprises, en particulier l’industrie manufacturière et agricole. La Montérégie est l’une des régions les plus dynamiques au Québec, avec une forte concentration d’industries qui exportent et importent des biens essentiels. Pour elles, disposer d’un terminal moderne et bien connecté leur permettra de maintenir ou de créer des bons emplois.
La guerre tarifaire qui affecte actuellement les relations avec les États-Unis illustre bien ce défi. Alors que des portes se ferment au sud, nos entreprises doivent pouvoir compter sur des corridors pour diversifier leurs marchés. Le projet d’expansion devient donc un outil stratégique : il leur permet d’accéder plus facilement à l’Europe, à l’Amérique latine et à l’Asie.
Miser sur la qualité plutôt que sur la quantité
Certains ont avancé que l’expansion serait inutile en raison de l’augmentation massive des navires. Cet argument ne résiste pas à la réalité. Nos installations peuvent accueillir aujourd’hui des navires de 6500 conteneurs et comme il s’agit souvent du seul arrêt, la cargaison est entièrement déchargée. Notre stratégie n’est pas d’imiter les grands ports asiatiques qui misent sur des géants de 20 000 conteneurs ou de copier des routes maritimes qui exigent qu’un navire s’arrête dans 5 ports avant d’être plein. Le Québec n’est ni la Chine, ni la Côte Ouest américaine. Notre modèle est différent : il repose sur une fréquence régulière avec des navires de taille raisonnable, permettant de recevoir, à Contrecœur, un à trois navires par semaine.
Cette approche est plus adaptée à la taille de notre économie, tout en misant sur les 6000 entreprises logistiques déjà présentes et que l’on ne veut pas voir déménager. Mieux encore, en maximisant le potentiel maritime, nos produits pourront être plus sobres en carbone et moins chers à la caisse que s’ils devaient passer par un port situé à des centaines de kilomètres.
Un projet rigoureusement encadré
Ce projet d’expansion portuaire est l’un des mieux encadrés au Canada avec près de 400 conditions imposées par les autorités fédérales et provinciales, après plus de 5 ans de consultation publique, des centaines d’avis d’experts. Chaque étape est soumise à des exigences strictes en matière d’environnement, de gestion de l’eau, de protection de la biodiversité et de cohabitation avec la communauté. Du comité de cohabitation jusqu’aux portes ouvertes pour aller à la rencontre des entreprises locales, les occasions d’échanger et de rendre des comptes se sont multipliées et vont se poursuivre.
Ce haut niveau d’encadrement est la garantie que le projet sera réalisé de façon responsable. Notre volonté est de démontrer qu’il est possible de concilier développement économique et respect de l’environnement.
Réduire l’empreinte carbone
Un port, c’est bien plus qu’un terminal. C’est un maillon essentiel de la chaîne logistique. Lorsqu’une entreprise choisit une chaîne d’approvisionnement, elle évalue la qualité de chaque maillon : coûts, délais, fiabilité, empreinte carbone. Avec Contrecœur, nous offrons une solution qui réduit le nombre de kilomètres parcourus par camion et optimise les liaisons ferroviaires et routières. Certes, d’ici plus d’une décennie, il y aura plus de camions (environ 3 %) sur le réseau routier supérieur, mais cela sera aussi beaucoup moins de camionnage en provenance de ports étrangers.
En parallèle, la diversification des corridors réduit notre dépendance, renforçant ainsi notre économie face aux crises. Alors que 98 % des exportateurs sont des PME, créer des routes maritimes, c’est leur donner l’occasion de grandir.
Une opportunité pour la Montérégie
Ce nouveau terminal à Contrecœur ne marque pas seulement une étape dans l’histoire du Port. C’est aussi un nouveau chapitre pour la Montérégie et pour tout le Québec. Des emplois seront créés, directement et indirectement. Des investissements seront réalisés, stimulant l’activité économique locale et générant des revenus pour les villes. Et surtout, ce projet permettra de rapatrier au Québec des marchandises de tous les jours qui avaient choisi d’autres ports concurrents.
En consolidant notre position, nous faisons en sorte de protéger la souveraineté économique du pays. Un chiffre en dit long : si seulement 6 % des exportations canadiennes vers les États-Unis empruntaient une autre voie que l’axe Nord-Sud, le Port atteindrait sa pleine capacité. Dire “désolé, non merci” aux entrepreneurs, n’est pas, à notre avis,une option.
Construire pour la prochaine génération
Le futur terminal s’inscrit dans une vision plus large : celle d’un corridor Saint-Laurent–Grands Lacs fort, compétitif et durable. Et à notre avis, après près de 30 ans de planification et des années d’études et de consultations, le moment est venu de passer à l’action. Alors que le taux de chômage augmente, que la guerre tarifaire attaque notre économie, que tous nos dirigeants veulent trouver de nouveaux débouchés internationaux pour nos produits, ce terminal peut et doit être un projet collectif au service de plusieurs générations.
D’ici à la mise en service, en 2030, plusieurs étapes doivent être franchies et à chacun de ces jalons, nous allons nous adapter. Même après plusieurs décennies de planification, nous demeurons ouverts pour trouver des solutions constructives pour concilier de nombreuses réalités.
Julien Baudry, vice-président Communications et Relations externes, Administration portuaire de Montréal