La Soreloise d’origine, qui a passé son enfance et son adolescence dans la région, est installée au Panama depuis huit ans. Le pays est le plus touché par la pandémie de toute l’Amérique centrale, alors que plus de 10 000 cas de COVID-19 sont recensés chaque jour depuis quelques semaines. Où elle habite, à Panama City, les règles sont très sévères.
« Je m’étais montrée discrète depuis un moment sur les réseaux sociaux, mais c’est quand j’ai lu les commentaires sous votre sondage (sur la page du journal Les 2 Rives) que j’ai décidé de raconter ce que je vis », révèle la femme de 34 ans, en entrevue.
Sur Facebook, elle a écrit ceci : « Je ne vois pas il est où le problème de porter un masque. Ça n’a tellement rien à voir avec vos droits et liberté. Vous êtes des gens privilégiés au Canada, vous avez suffisamment de lits dans vos hôpitaux, il n’est pas nécessaire de les remplir. Tentez d’arrêter de regarder votre petit nombril. Surtout que c’est temporaire. »
Selon Claudia Lafond, il est important de penser aux autres en ce moment. « Ici, je porte le masque depuis quatre mois et je ne me plains pas. Et ce n’est pas parce qu’il ne fait pas chaud avec un masque, il fait au-dessus de 30 degrés chaque jour! On ne sait pas quand on va pouvoir recommencer à vivre comme avant, mais porter un masque, ce n’est pas la fin du monde. L’humain est capable de s’adapter à toutes les situations », remarque-t-elle.
Un droit de sortie limité
Depuis le 31 mars au Panama, les femmes peuvent sortir de la maison seulement les lundis, mercredis et vendredis. Les hommes seulement les mardis, jeudis et samedis. Puis le dernier numéro sur son passeport (ou sur la carte du citoyen pour les Panaméens) indique son heure de sortie. Pour Claudia Lafond, il s’agit du zéro, ce qui signifie qu’elle peut circuler de 9 h 30 à 11 h 30 le matin. Elle peut faire ses courses à l’épicerie, à la banque ou à la pharmacie de 10 h à 11 h.
« En plus, il y a eu des quarantaines totales lors des fins de semaine, donc les hommes ne pouvaient sortir que les mardis et jeudis. À cause de la flambée de cas, le gouvernement a annoncé que la fin de semaine prochaine (les 18 et 19 juillet, au moment de l’entrevue), ce sera quarantaine complète pour tout le monde de vendredi 19 h à lundi 5 h », décrit-elle.
Et le port du masque dans tout ça? « C’est non négociable. On n’a pas le droit de sortir sans notre masque. »
Les hôpitaux débordent
Au Panama, où vivent environ quatre millions de personnes, plus de 1000 cas sont recensés chaque jour. Sur les quelque 22 000 cas actifs la semaine dernière, environ 21 000 sont à la maison ou à l’hôtel, d’où les importantes mesures sanitaires en vigueur.
Quant aux 1000 autres personnes infectées, elles se retrouvent à l’hôpital. Le hic, c’est que seulement 1000 lits sont à leur disposition. Parmi ces 1000 personnes hospitalisées, une soixantaine sont aux soins intensifs, alors que le Panama ne dispose même pas de 100 lits pour les soins intensifs.
« Les hôpitaux débordent ici. On voit ce que ça fait quand les gens n’écoutent pas les consignes. On ne peut pas retourner à la vie normale avant un bout à cause de gens qui disent que leur liberté est brimée », remarque Mme Lafond.
Une vie différente
En 2011, Claudia Lafond a rencontré son conjoint lors d’un voyage touristique au Panama. Après l’avoir fréquenté à distance et y être retourné quelque fois, elle s’y est implanté pour de bon en 2012.
Les deux tourtereaux se sont mariés en 2014 et ont, il y a plusieurs années, créé leur propre entreprise de localisation satellitaire InnovaGPS. Les vols de voiture étant monnaie courante au Panama, le couple s’est lancé dans l’implantation de systèmes GPS sur les automobiles.
« À cause de la pandémie, on a perdu environ 50 % de nos revenus, estime-t-elle. On se compte chanceux, on continue de travailler. On ne va plus au bureau, donc on a transformé notre chambre d’ami en bureau. Mon époux peut aller voir des clients avec son permis spécial », explique-t-elle.
Claudia Lafond revient normalement au Québec environ deux fois par année. Elle devait d’ailleurs partir en voyage en juin, mais tout est tombé à l’eau. « La réouverture de l’aéroport est prévue le 8 août, mais ça fait trois fois que c’est reporté. On s’attend à ce que ce soit encore long. Mais il ne faut pas lâcher, on le sait que c’est temporaire, tout comme le port du masque », conclut la Soreloise.