Intitulé Un prêtre orphelin parle, cet ouvrage est un peu le prolongement de ce qu’il a toujours fait : écrire. « J’ai écrit dans les journaux locaux comme dans L’Annonceur de Pierreville. Je faisais part de mes réflexions, de mes commentaires. J’ai toujours écrit », explique Lionel Émard.
C’est parce que beaucoup le poussaient dans le dos pour écrire sur sa vie qu’il a finalement cédé à la pression. « Tous voulaient savoir quel genre de gars j’étais », justifie celui qui a maintenant 86 ans bien sonnés.
Il se raconte donc de la naissance jusqu’à ses derniers moments comme curé à Yamaska en 2023. Mais comment tout a commencé pour lui? A-t-il eu un appel de Dieu pour stimuler sa vocation? « Rien de tout cela. J’ai passé mon enfance dans une crèche et dans un orphelinat. Et c’était des religieux qui administraient ce genre d’endroits. J’ai baigné là-dedans pendant toute mon enfance. C’est le milieu dans lequel je vivais qui a façonné mon destin », explique Lionel Émard.
Un curé qui fait l’unanimité
Dans toute sa vie consacrée à la prêtrise, quels ont été les moments les plus marquants? « Mes rencontres avec les gens. C’est cela qui m’a toujours plu. Je trouve ça plate pour les prêtres qui vivent entre quatre murs et qui ne voient jamais personne. Je les plains », confie Lionel Émard.
Ce dernier considère qu’il est privilégié puisqu’il a toujours été apprécié de ses paroissiens. « Je me sentais aimé. Je considère avoir été chanceux. Et je continuais aussi à rencontrer des gens qui avaient pris leur distance avec l’Église puisque même si l’église était vide, je m’intéressais à ce qui se passait dans notre milieu, je m’impliquais dans la communauté. »
Désillusion
Si Dieu a dicté ses pas, il demeure amer à propos de l’attitude de l’Église dans les dernières années. « L’Église n’a pas encore saisi que les gens sont libres et indépendants. Elle livre le même discours à ceux d’aujourd’hui qu’à ceux d’hier. On a manqué le bateau, mais on ne veut pas le reconnaître. »
Mais encore? « L’Église n’a pas compris ce qui s’est passé, notamment au niveau des scandales sexuels. Tout cela va à l’encontre de l’enseignement du Christ, mais l’Église ne le reconnaît pas. Elle ne reconnaît pas l’échec. On ne fait pas la distinction entre les faiblesses humaines et les actes criminels. Les prêtres qui ont eu une liaison avec une femme sont punis plus sévèrement que ceux qui se rendent coupables de pédophilie, lesquels sont simplement déplacés ailleurs. L’Église ne reconnaît pas la gravité de ses fautes », croit-il.
Lionel Émard ne blâme pas ceux qui se sont éloignés de l’Église et de l’église. Et que pense-t-il de la société aujourd’hui où Dieu est de plus en plus invisible, chez les catholiques d’ici, à tout le moins? « En général, la société n’est ni meilleure ni pire qu’avant », de répondre le curé bien-aimé.
Aujourd’hui, Lionel Émard vit en résidence à Saint-Hyacinthe avec d’autres collègues prêtres comme lui, mais la retraite est loin de lui aller comme un gant. « C’est plate. Je m’ennuie ici », conclut-il un peu las. Lionel Émard s’ennuie de son monde et son monde s’en ennuie. Le plus triste, c’est quand on l’entend parler du cimetière comme sa prochaine destination.
Le 7 juin dernier, son livre a été lancé officiellement au Pavillon communautaire de Yamaska en présence de plusieurs dignitaires. En attendant, des copies sont disponibles auprès du président de la Société historique de Saint-David, Jacques Crépeau,au coût de 15 $, qu’on peut joindre au 450 789-0425.