9 mai 2023 - 11:03
Raison d’être
Par: Louise Grégoire-Racicot

Depuis le début des années 80, Louise Grégoire-Racicot pose son regard sur la région comme journaliste à travers les pages du journal Les 2 Rives. Depuis février 2018, à titre de chroniqueuse, elle livre maintenant chaque semaine son opinion sur l'actualité régionale.

Que de chemin parcouru depuis ce premier et modeste Gala du mérite économique tenu en 1986 dans la cafétéria de l’École secondaire Bernard-Gariépy. Rien à voir avec ceux d’aujourd’hui!

La région traversait alors une sombre période. Récession, grèves et lock-out avaient sévi. On craignait des fermetures d’usines. Les nombreuses mises à pied avaient affecté familles, secteur commercial et des services. La région avait perdu son état de grâce!

Voulant que la région renoue avec la prospérité, la Corporation de développement économique – ancêtre de la Corporation de développement communautaire Pierre-De Saurel – le Cégep, la Chambre de commerce, la SADC et le journal Les 2 Rives se sont unis pour inventer la version soreloise d’un tel gala en s’inspirant d’initiatives d’ailleurs. Histoire notamment de faire découvrir l’apport économique des forces vives trop souvent discrètes du milieu.

Ce soir-là, on en a honoré six. C’est loin des 17 lauréats d’aujourd’hui dans autant de sphères d’activités. Le Gala est désormais la grand-messe faste du monde économique régional qui a salué jusqu’ici l’apport inestimable des plus de 250 gens d’affaires et intervenants qui ont contribué à l’avancement de dossiers essentiels à la survie de leur entreprise et à une vie régionale plus saine. De ce nombre, seuls deux politiciens ont été honorés, Marcel Gauthier et Réjean Auger, les deux maires qui avaient signé la fusion de leur municipalité Sorel et Saint-Pierre-de-Sorel, en 1992. Une avancée importante pour la région, estimait-on.

De fait, l’entrepreneuriat n’était pas ce qu’il est maintenant. Le profil des entrepreneurs a évolué. Ceux des années 80, parfois mis à pied, sont presque venus à l’entrepreneuriat par obligation. Ils ont créé leur emploi à leur mesure, dans leur champ d’expertise : l’acier.

Même sans savoirs poussés en administration, mise en marché ou gestion des personnels, ils ont plongé, créant diverses PME dont plusieurs sont aujourd’hui fort prospères. Parce qu’ils avaient ce savoir-faire, cette détermination et cette passion si nécessaires à l’atteinte d’objectifs puis du succès.

Malgré la présence d’entreprises familiales solides, l’entrepreneuriat n’était alors pas une option. Les conditions de travail en usine étaient sans risque, lucratives et sécurisées, favorisant même les employés issus d’une même famille. C’est pourtant à la suite de conflits de travail qui les excédaient que certains ont fondé leur entreprise!

Ces fonceurs ont travaillé sans compter les heures, ont souvent innové et réussi. Mais détestant être mis en valeur, il fallait les talonner pour qu’ils posent leur candidature aux prix Joseph-Simard. Pour taire leurs résultats financiers? Ne pas avoir l’air de se vanter ou d’aller contre les préceptes judéo-chrétiens dans lesquels ils avaient grandi? Personne ne le sait vraiment.

Heureusement, l’entrepreneuriat est sorti de cette ère. Ses meneurs sont aujourd’hui beaucoup plus jeunes. Ils ont créé une entreprise non par obligation, mais par goût de se réaliser autrement.

Plus éduqués, ils sont mieux armés pour avancer parce qu’ils savent travailler autrement et en équipe, recourir à des conseillers au besoin, sont créatifs, audacieux et dynamiques. Ils investissent tous les domaines, des plus classiques aux plus surprenants. Et ils admettent à haute voix qu’ils sont fiers de ce qu’ils accomplissent. Comme c’est réjouissant!

Oui, ce gala est vraiment un moment privilégié et public de reconnaissance et de fierté régionale. Décidément, il a toujours sa raison d’être!

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