Via communiqué, l’entreprise informe que la décision, prise sur la base d’analyses approfondies, était difficile à prendre, mais nécessaire. « Elle est attribuable à un déclin du marché des poudres métalliques dû à l’évolution de l’industrie de l’automobile vers les véhicules électriques, ainsi qu’à une surcapacité des producteurs de poudres métalliques se traduisant par une pression sur les prix et une diminution des ventes », peut-on lire.
Aussi, RTFT soutient que la grève des employés syndiqués de l’Usine des poudres en cours depuis juillet 2025 est venue accélérer la baisse des ventes à un niveau qui ne permet plus d’assurer la viabilité de l’Usine des poudres.
En entrevue, Jean-François Gauthier, le directeur exécutif de RTFT – Opérations Québec, a révélé que 85 % des poudres métalliques produites à Sorel-Tracy sont destinés à l’industrie automobile. Cette décision était donc difficile, mais nécessaire pour assurer la viabilité et la compétitivité de l’entreprise.
« Depuis 2023, les conditions de marché sont somme toute très difficiles. Malgré tous les efforts, l’entreprise se retrouve dans une situation financière précaire. Depuis cinq ans, on se retrouve en surcapacité. On produit 65 % et 70 % de notre pleine capacité principalement en raison de la transition dans le marché automobile. Pour les différentes composantes d’une voiture avec un moteur à combustion, 36 livres de poudres métalliques sont nécessaires, tandis qu’une voiture électrique en a besoin de seulement six livres », explique-t-il, en ajoutant être « conscient des impacts que cette décision aura sur les employés, les clients et la communauté de Sorel-Tracy ».
Concernant la trentaine d’employés-cadres, M. Gauthier soutient qu’ils pourraient être relocalisés sur le complexe de Sorel-Tracy. « Pour les employés syndiqués, on a informé l’exécutif syndical qu’on veut négocier un protocole de fermeture. On devra donc attendre les conclusions de cette négociation pour être capable de parler des mobilités en termes de transition des employés. Par contre, il va y avoir des programmes de transition de carrières pour les employés touchés », détaille le directeur.
Les activités minières et portuaires de RTFT se poursuivront à Havre-Saint-Pierre, tout comme la production de dioxyde de titane, de fer de haute pureté, de billettes d’acier et d’oxyde de scandium au Complexe métallurgique et de minéraux critiques de Sorel-Tracy, tandis que Rio Tinto poursuit sa révision stratégique des actifs de RTFT annoncée en août 2025. Cette révision pourrait éventuellement se conclure en vente.
« Dans la mesure du possible, l’Usine des poudres métalliques continuera d’honorer ses contrats avec ses clients et ses ententes avec des fournisseurs, avant de cesser définitivement ses activités d’ici la fin de 2025 », lit-on via communiqué.
Concernant les installations de l’Usine des poudres métalliques, Jean-François Gauthier affirme qu’il est encore trop tôt pour connaître leur futur.
Le syndicat réagit
Le Syndicat des Métallos, qui représente les 181 travailleurs de la section locale 7493 affectés à l’Usine des poudres métalliques, a réagi par voie de communiqué quelques minutes après l’annonce de l’entreprise. « On comprend que cette décision s’inscrit dans un contexte difficile au plan du commerce international, alors que la politique commerciale pressurise l’industrie et qu’il y a une surcapacité mondiale », affirme Nicolas Lapierre, le directeur québécois des Métallos.
Les services juridiques du Syndicat des Métallos ont été saisis du dossier et seront impliqués dans les discussions sur le protocole de fermeture.
« Nous allons veiller au grain pour que les droits des travailleurs soient respectés dans le processus. C’est une situation très difficile pour les travailleurs et nous déplorons la façon de faire de la compagnie qui prend prétexte de la grève pour motiver sa décision d’affaires », ajoute M. Lapierre.
En entrevue, M. Lapierre a dévoilé qu’en septembre 2024, RTFT avait émis le souhait de parapher une convention collective de 18 mois qui mènerait les deux parties en décembre 2025. « Curieusement, on arrive à l’échéance de décembre 2025 et la compagnie nous annonce une fermeture. Je pense que deux plus deux ça fait quatre. On fait une corrélation. Notre préemption est que les dés étaient pipés », soutient-il.
Par ailleurs, dans les derniers jours, on apprenait que RTFT avait eu recours à trois briseurs de grève, ce qui a été confirmé par un jugement du Tribunal administratif du travail.
De nombreuses réactions
Dans la foulée de la nouvelle, les réactions n’ont pas tardé à fuser de partout. « Je pense d’abord aux employés et à leurs familles, à celles et ceux qui chaque jour donnent le meilleur d’eux-mêmes dans cette usine. Vous faites partie de notre communauté, de notre force. Vous méritez tout notre respect et tout notre soutien. En tant que maire, je m’engage à ce que la Ville soit à vos côtés, qu’aucune personne ne soit laissée seule dans cette transition », écrit le maire sortant de Sorel-Tracy, Patrick Péloquin.
« Cette usine fait partie de l’histoire industrielle de notre territoire. Sa fermeture représente non seulement une perte économique, mais aussi un choc collectif pour la région. Dans des moments comme celui-ci, la solidarité régionale prend tout son sens », souligne le maire de Saint-Joseph-de-Sorel et préfet de la MRC, Vincent Deguise.
« Notre priorité est de nous assurer que chaque personne affectée bénéficie pleinement de tout le soutien nécessaire. Les équipes du ministère de l’Emploi sont entièrement mobilisées et travaillent en étroite collaboration avec l’entreprise afin de garantir le respect de ses obligations et d’accompagner les travailleurs tout au long de cette période éprouvante », soutient le député de Richelieu, Jean-Bernard Émond.
« Je resterai pleinement mobilisé pour que tout soit mis en œuvre afin d’accompagner les employés concernés et pour que des perspectives de reconversion ou de redynamisation du site soient étudiées avec diligence », mentionne le député bloquiste Louis Plamondon.
Avec la collaboration de Jean-Philippe Morin.