16 décembre 2020 - 14:50
Séquestration, jalousie et violence conjugale : Martin Lussier écope de six ans de prison
Par: Jean-Philippe Morin

Martin Lussier passera les cinq prochaines années derrière les barreaux. Photo tirée de Facebook

L’homme qui a attaché sa conjointe à son lit pendant plusieurs semaines parce qu’il la soupçonnait de coucher avec son voisin a écopé d’une peine de six ans de prison le 4 décembre, au palais de justice de Sorel-Tracy. La victime a même eu le courage de s’adresser à son bourreau avant le prononcé de la sentence.

Comme sa détention provisoire équivaut à environ un an, il lui reste cinq ans de prison à purger. L’accusé a aussi été condamné comme délinquant à contrôler pour une période de huit ans et il a été enregistré dans le registre des délinquants sexuels pour une période de 20 ans. « Les victimes sont satisfaites de cette peine », a tenu à spécifier la procureure de la Couronne, Me Geneviève Beaudin.

Martin Lussier, 39 ans, s’est introduit dans l’appartement de son voisin le 16 avril dernier. Il l’a roué de coups en l’accusant de coucher avec sa blonde avant de voler certains objets. À la suite d’une plainte reliée à cette affaire, des policiers sont entrés chez lui et ont découvert sa conjointe attachée au lit avec une chaîne et un cadenas.

Au cours de leur relation, Martin Lussier était tellement jaloux qu’il battait et étranglait la victime. Il allait jusqu’à l’enfermer à l’intérieur de sa maison et à placarder les portes et fenêtres pour l’empêcher de sortir, de peur qu’elle le trompe.

L’homme de Sorel-Tracy avait plaidé coupable à sept des 17 chefs d’accusation auxquels il faisait face, en mai dernier, dont séquestration, étranglement, voies de fait, introduction par effraction menant à des voies de fait et des vols, menaces de mort et bris de probation.

Martin Lussier a aussi été déclaré coupable d’agression sexuelle sur une autre victime dans un autre dossier.

Suggestion commune

Le juge Marc-Nicolas Foucault a entériné la suggestion commune des avocats de la Couronne Geneviève Beaudin et de la défense Christian Crevier puisque la sentence de six ans de prison se retrouve dans la fourchette des crimes en semblable matière.

« C’est une sentence importante, mais je suis conscient qu’il n’y a aucune peine qui répare complètement ce que les victimes ont vécu », a-t-il souligné.

Le juge Foucault a tenu en compte les facteurs atténuants, comme l’absence de casier judiciaire et le fait que Martin Lussier a plaidé coupable dans plusieurs dossiers. Mais il a surtout insisté sur les nombreux facteurs aggravants.

« Les crimes sont graves. Les crimes laissent des séquelles sur les victimes. Le remords et l’empathie sont très faibles. Le risque de récidive est élevé en matière de violence conjugale », a énuméré le juge avant de rendre sa décision.

L’avocat de l’accusé a tenu à mentionner au juge que son client était sur la bonne voie. « Depuis qu’il est en détention, il réalise que le comportement qu’il avait était inadéquat. Il espère suivre des programmes proposés en milieu carcéral pour en venir à corriger ses problématiques », a indiqué Me Christian Crevier.

Martin Lussier devra respecter plusieurs conditions, dont un interdit de contact avec les victimes et d’autres personnes au dossier. Un échantillon de son ADN a été prélevé et il lui sera interdit de posséder des armes pendant 10 ans.

Une victime livre un témoignage émotif

Catherine*, une des deux victimes de Martin Lussier, a tenu à s’adresser au juge avant qu’il rende sa décision. Après avoir été séquestrée pendant plusieurs semaines, elle a pris son courage à deux mains afin de raconter ce qu’elle a vécu.

« Avec le recul, je prends conscience que notre relation était toxique. Plus que toxique. J’ai vécu l’enfer. J’ai été et je suis encore détruite par les actes criminels dont j’ai été victime. Les conséquences sont encore présentes dans ma vie. J’ai besoin de support, de me reconstruire et de repartir sur un nouveau départ », a-t-elle témoigné.

Si la relation a débuté avec un grand amour, elle a rapidement évolué dans le mauvais sens, selon Catherine. Martin Lussier a commencé à la frapper, il était agressif, impatient et jaloux puisqu’il pensait qu’elle le trompait.

« Aujourd’hui, je peux dire que j’étais totalement sous son emprise. Il était de plus en plus contrôlant et manipulateur. Pendant notre relation, j’étais isolée de ma famille, de mes amis. La seule personne sur qui je pouvais compter, c’était moi, mais mon jugement était affecté par l’amour que je lui portais », a-t-elle raconté en arrêtant à quelques reprises pour reprendre ses émotions.

Selon elle, la seule façon pour sortir de sa relation était que des policiers la trouvent. Ce qui est arrivé à la mi-avril. « J’ai enfin pu raconter ce que je vivais pour me rendre compte petit à petit de l’anormalité de la relation. […] J’ai encore des flashback et des crises de panique aujourd’hui. La vie continue, mais je suis traumatisée par les événements qui sont arrivés. Les émotions sont mélangées dans ma tête. […] J’ai grandi de tout ça, j’ai beaucoup appris », a-t-elle poursuivi.

Catherine a terminé son témoignage d’environ cinq minutes en s’adressant directement à l’accusé. « En terminant, je voudrais te dire, Martin, que jamais je ne t’ai trompé. Jamais je ne t’aurais fait du mal autant que tu m’en as fait. Aujourd’hui, je tourne la page, mais je ne comprendrai jamais pourquoi tu m’as fait vivre tout ça. J’essayais de t’aimer comme une femme aime un homme. Je veux que tu saches que je ne me sens pas coupable de la situation dans laquelle tu te trouves présentement. Ce n’est pas de ma faute. J’espère que tu prends conscience que ce sont tes comportements qui t’amènent là où tu es », a-t-elle conclu, le trémolo dans la voix.

*Nom fictif pour préserver son identité.

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