Cette usine de cinq étages sera implantée dans la zone industrialo-portuaire Saint-Laurent, c’est-à-dire le parc industriel Joseph-Simard du secteur Tracy, sur une superficie de 350 000 pieds carrés. Les travaux devraient débuter d’ici quelques jours et durer environ 18 mois. Une mise en service est prévue à la fin de 2027.
On se rappellera qu’en juin 2024, le ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie annonçait 11 projets sélectionnés pour recevoir un raccordement d’une puissance de 5 mégawatts (MW) et plus au Québec. TDF Canada était le seul projet à avoir été accepté en Montérégie (voir ci-bas). À ce moment, plusieurs questions étaient restées en suspens jusqu’à l’annonce du 27 février.
Textiles non tissés
L’usine sera dédiée à la production de textiles non tissés à base de polyester vierge ou recyclé, une catégorie de matériaux utilisée dans différentes industries qui demeure en forte croissance en raison de sa légèreté, de sa résistance et de sa durabilité.
« On parle de matière première utilisée surtout dans l’industriel et dans la construction. Ça donne des propriétés mécaniques à des produits d’étanchéité, par exemple dans un toit, un mur ou une fondation », explique en entrevue le directeur général de TDF Canada, Stéphane Beaulé, qui estime que les deux tiers de ses clients se trouvent surtout en Europe, alors que le tiers est au Canada. « On a un peu de clients aux États-Unis, mais ce n’est pas la majorité. Donc l’histoire des tarifs, ça nous affecte, mais ce n’est pas critique », poursuit-il.
Dans son discours, M. Beaulé s’est réjoui de renforcer la présence de l’entreprise en Amérique du Nord. « Ça nous permet de rapatrier une expertise qui avait fui vers la Chine. Ça va être la première usine de ce type au Québec et au Canada. […] C’est un projet dont on est fier parce qu’on ramène les chaînes d’approvisionnement au Québec », a-t-il mentionné.
Le maire de Sorel-Tracy n’a pas manqué de souligner que cette annonce survenait dans un contexte d’imposition de tarifs douaniers par l’administration Trump. « [Cela] nous rappelle l’importance de renforcer notre capacité de production locale. C’est un défi, mais c’est aussi une occasion d’innover », a-t-il mentionné.
Symbiose industrielle et environnement
Le directeur général de TDF Canada a identifié plusieurs raisons qui ont motivé l’entreprise à s’installer à Sorel-Tracy, la principale étant la situation géographique près du fleuve, du chemin de fer et de l’autoroute.
Une synergie industrielle sera également créée avec les entreprises situées à proximité, dont Machinex. Ce que Patrick Péloquin a salué. « Ce projet s’inscrit parfaitement dans notre stratégie de développement économique basée sur la symbiose industrielle, le principe selon lequel les matières résiduelles d’une entreprise peuvent devenir les matières premières de l’autre. TDF Canada intégrera des bouteilles de plastique recyclées dans ses produits, et l’entreprise Machinex sera voisine et récupère justement les bouteilles de plastique consignées », a-t-il mentionné fièrement.
D’ailleurs, Stéphane Beaulé a assuré que son usine ne sera pas polluante, ou très peu du moins. « Je vous assure qu’il n’y aura pas de traitement chimique. C’est de l’extrusion de polyester. On utilise de l’eau pour diluer une colle qui ressemble à de la peinture. On va mettre en place un système de traitement des eaux. La fumée qui va sortir des cheminées, c’est de la vapeur d’eau, donc rien de toxique. En utilisant une matière première recyclée au lieu d’une matière première vierge, on va diminuer de 72 000 tonnes notre empreinte carbone », a-t-il énuméré.
Quant aux rejets industriels, M. Beaulé assure avoir déjà identifié des partenaires qui vont pouvoir recycler cette partie de la production. Il soutient également que la machinerie ne fera pas de bruit et qu’à terme, on y verra entre 20 et 40 camions par jour circuler sur la rue Industrielle. « Tout ce projet a été fait pour s’inscrire dans les bonnes pratiques environnementales », explique le directeur général.
Et la suite?
Le directeur général de Développement économique Pierre-De Saurel (DEPS), David Plasse, a mentionné que de nombreux efforts sont effectués depuis trois ans afin de faire rayonner la région et d’attirer des entreprises. « Et les résultats sont là. Nous avons su nous repositionner comme un pôle économique d’intérêt […]. Dans la zone industrialo-portuaire Saint-Laurent, nous avons commencé en 2022 avec six millions de pieds carrés disponibles. Aujourd’hui, il nous reste moins de deux millions de pieds carrés, tous en pourparlers », a-t-il dévoilé.
Patrick Péloquin a félicité tous les gens impliqués et il a promis que d’autres investissements suivront. « Ce projet est une preuve éclatante de notre capacité à attirer des investissements majeurs et à créer des opportunités pour notre communauté. Ce n’est pas fini, ce n’est qu’un début », a conclu le maire de Sorel-Tracy.
Et les blocs d’énergie dans tout ça?
Pour en arriver au projet de TDF Canada, le ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie a octroyé 10 MW à l’entreprise en juin 2024. Toutefois, trois autres entreprises avaient effectué des demandes pour des projets de plus de 5 MW qui ont toutes été refusées par le gouvernement, soit Charbone, Rio Tinto Fer et Titane ainsi que Sorel Forge. En entrevue, le député de Richelieu, Jean-Bernard Émond, a assuré qu’il ne laissera pas tomber les entreprises concernées. « Lors de notre rencontre avec l’ancien ministre Pierre Fizgibbon et les intervenants de la région, on lui a fait part de l’ensemble des projets demandés par la région. Avec les critères de sélection très précis du Ministère, qui sont publics d’ailleurs, c’est TDF qui a scoré avec un pointage plus élevé. Il y a eu seulement 11 blocs attribués au Québec et TDF est le seul projet retenu en Montérégie, il faut s’en réjouir. Pour les autres demandeurs, ça ne veut pas dire que les projets sont morts, bien au contraire. J’ai rencontré les Forges de Sorel à plusieurs reprises et avec la ministre Christine Fréchette, on va rencontrer les dirigeants pour qu’éventuellement, ils aient une réponse favorable à leur demande », a-t-il dévoilé.
Chronologie des événements
Juin 2023 : Première rencontre entre TDF Canada et la Ville de Sorel-Tracy. Quatre villes sont en lice pour accueillir l’usine.
Février 2024 : Rencontre entre l’ancien ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, et des intervenants économiques et politiques de la région, à Québec. Le projet de TDF Canada à Sorel-Tracy est amené sur la table.
Juin 2024 : Octroi de blocs d’énergie à 11 entreprises, dont TDF Canada.
Août 2024 : Les dirigeants de TDF Canada visitent la ville de Sorel-Tracy avec des organismes, dont L’Orienthèque, le Cégep de Sorel-Tracy et le Centre de formation professionnelle de Sorel-Tracy.
Février 2025 : TDF Canada annonce les détails de l’usine. Les travaux, prévus pour 18 mois, devraient résulter en une ouverture vers la fin de 2027.