22 avril 2020 - 10:34
Travailleurs étrangers : des producteurs de la région sont encore dans le néant
Par: Sébastien Lacroix
César, un des travailleurs de Villiard Serres et Jardins, à Saint-Aimé.
Photo gracieuseté

César, un des travailleurs de Villiard Serres et Jardins, à Saint-Aimé. Photo gracieuseté

Les travailleurs étrangers temporaires pour la cueillette des fruits et légumes arriveront-ils à temps dans la région? Avec la période de confinement de 14 jours imposée par le fédéral et les obstacles qu’ils rencontrent dans leurs propres pays, des producteurs sont inquiets.

C’est le cas de Nicole Saint-Jean de La Sublime Asperge, dans le rang Saint-Thomas, à Saint-Aimé. L’entreprise, qui embauche en temps normal une douzaine de travailleurs étrangers, n’en a trouvé que deux pour le moment.

« Il y a beaucoup de confusion, nous a-t-elle confié, la semaine dernière. Ils devaient arriver samedi, mais le gouvernement mexicain ne les avait pas contactés. Ils n’étaient pas au courant qu’ils avaient un vol. Ils [les gouvernements étrangers] ne sont pas trop pour ça de les laisser partir. »

Le temps presse, puisque la saison débutera dès la mi-mai et les producteurs ont besoin d’une main-d’œuvre stable et efficace. Ce qu’ils n’arrivent pas nécessairement à trouver avec des Québécois.

« On pourrait fonctionner avec des agences spécialisées qui nous envoient des travailleurs agricoles. S’il faut payer 18 $ à 20 $ de l’heure, est-ce que ça vaut la peine? Ça coûte plus cher de les ramasser que de les laisser là », fait remarquer la productrice.

Celle-ci est tout de même déterminée à faire sa récolte et ouvrir son kiosque de vente à la ferme. « Si nous avons cinq ou six travailleurs étrangers pour ramasser, ce serait correct. Parce que pour classer ou couper à l’intérieur, ça peut se faire avec une main-d’œuvre locale. »

Comme les plants sont aux 30 pouces, les mesures de distanciation pourraient aussi complexifier le travail. D’autres façons de faire pourraient donc être envisagées pour la cueillette des asperges. « Avec trois machines qui se suivent, ce pourrait se faire », note-t-elle.

Du côté de la Ferme Jean-Yves Gamelin, sur le chenal Tardif, à Pierreville, où 11 travailleurs étrangers temporaires viennent chaque été, on est dans le néant actuellement. Il y a trois Guatémaltèques qui devaient arriver jeudi dernier, mais leur gouvernement a interdit les déplacements entre les villes. Ce qui fait en sorte qu’ils ne peuvent pas se rendre à l’aéroport, et ce, au moins jusqu’au 1er mai.

C’est un peu moins problématique dans leur cas. Parce que les besoins se situent surtout au moment de la cueillette des fraises, qui se fait généralement en juin. Ce qui fait en sorte qu’on souhaite un printemps tardif pour donner plus de temps aux travailleurs étrangers d’arriver et de faire leur quarantaine. « C’est plus problématique pour ceux qui font de la laitue et des poireaux. Des cultures qui sont très printanières », indique l’un des propriétaires, Sylvain Lavoie.

« Ça va bien avec des travailleurs locaux pour le moment. Normalement, nous avons deux ou trois travailleurs étrangers qui arrivent au début mai, mais on devrait être en mesure de se débrouiller nous-même », souligne M. Lavoie.

« On garde espoir, continue-t-il. Parce qu’eux autres aussi, ils veulent travailler. Ils ont des familles à nourrir et les gouvernements sont conscients que ça apporte de l’argent dans le pays. »

Chez Villiard Serres et Jardins, dans le rang Saint-Yves, à Saint-Aimé, la situation devait rentrer dans l’ordre en fin de semaine avec l’arrivée de deux travailleurs étrangers. « On se croise les doigts », indiquait toutefois le propriétaire, Pierre-Luc Villiard, puisque les travailleurs attendaient toujours leur OK au moment de lui parler.

Normalement, les travailleurs étrangers arrivaient en mars et travaillaient jusqu’en juillet. Tandis que cette année, ils ne pourront pas commencer avant le début de mai en raison de la période de 14 jours de confinement.

Ç’a déjà paru sur la production qui a pu continuer au cours des dernières semaines. Puisque l’horticulture a été inscrite dès le départ sur la liste des services essentiels. L’entreprise a toutefois dû rouler à personnel réduit. Ce qui a entraîné une légère diminution de la production.

Prime de 100 $ aux Québécois prêts à aider dans les champs

Québec a annoncé, le 17 avril, un investissement de 45 M$ pour attirer les travailleurs québécois dans les champs. Les agriculteurs pourront ainsi bénéficier d’un coup de main essentiel pour la période de plantation et de récolte.

Cet investissement financera quatre mesures, dont une prime de 100 $ aux travailleurs agricoles saisonniers pour une prestation de travail minimale de 25 h par semaine. Les personnes intéressées peuvent s’inscrire sur le site emploiagricole.com ou communiquer avec le centre d’emploi agricole de la région.

« Dans le contexte difficile engendré par la COVID-19, le gouvernement met tout en œuvre pour assurer l’approvisionnement régulier en nourriture. Nous invitons les Québécois à investir les champs cet été pour prêter main-forte à nos agriculteurs. Nous visons à aider les entreprises agricoles à disposer de la main-d’œuvre nécessaire à leurs activités et à favoriser la sécurité alimentaire de la population », souligne le ministre de l’Agriculture, André Lamontagne.

Rappelons qu’environ 10 000 travailleurs étrangers temporaires étaient normalement attendus au Québec, mais plusieurs d’entre eux ne pourront s’y rendre cette année.

Avec la collaboration de Jean-Philippe Morin

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