Je veux être clair : mon propos ne vise pas le fait que l’école soit fermée cette journée-là. Il cible plutôt le choix de ne pas accompagner les élèves au moment de l’éclipse.
Je ne suis pas gestionnaire scolaire. Je ne suis pas confronté aux défis d’organisation et de planification de cette situation particulière, créée par une éclipse solaire au beau milieu de l’après-midi d’une journée d’école. Mais alors, pourquoi les gestionnaires scolaires des CSS de Saint-Hyacinthe et des Patriotes, nos proches voisins, sont-ils en mesure de prendre la décision de garder les écoles ouvertes pour cet événement?
Dans leurs communications, ces deux centres de services scolaires ne mettent pas l’accent sur les difficultés logistiques, mais plutôt sur l’expérience unique qu’ils souhaitent faire vivre à leurs élèves. Le CSS de Saint-Hyacinthe indique que ses écoles demeureront ouvertes « de manière à permettre aux élèves de vivre une expérience pédagogique mémorable ».
Du côté du CSS des Patriotes, on nous informe qu’afin « de pouvoir assister à ce phénomène historique de façon sécuritaire et saisir cette occasion unique pour partager collectivement un moment d’émerveillement, des activités d’apprentissage seront mises en place dans toutes les écoles. »
Chez nos voisins, bien sûr, il a fallu aménager des aspects logistiques pour assurer la sécurité des élèves en respectant les consignes exigeantes des ministères de l’Éducation et de la Santé et des Services sociaux, modifier sinon carrément annuler le transport scolaire et mobiliser les parents. Mais l’aspect exceptionnel de ce phénomène astronomique et la possibilité de le vivre à l’école, ensemble et dans un contexte d’apprentissage, semblent avoir eu plus d’importance à leurs yeux que les difficultés d’organisation.
N’est-ce pas la mission de l’école?
Oui, c’est vrai que cette décision me rend triste. Bien au-delà de son aspect spectaculaire, il s’agit d’un phénomène astronomique propice à une sensibilisation à la science. Mettre la priorité sur les difficultés d’organisation plutôt que sur le potentiel d’apprentissage me semble manquer de perspective.
Si on le compare aux deux autres centres de services scolaires voisins, le nôtre compte une grande proportion d’écoles dont l’indice de défavorisation est élevé. Cette situation augmente les défis tant pour les gestionnaires, les enseignants que pour les élèves eux-mêmes et leurs parents. Mais pourquoi est-ce eux, justement, qu’on prive de vivre, en temps réel, une expérience à caractère scientifique dans un contexte scolaire?
Suis-je trop dur? Mes attentes sont-elles trop élevées? Peut-être.
Au Québec, au-delà de l’apprentissage de certaines sciences, nous avons de la difficulté à générer un environnement de culture générale qui comprendrait aussi des aspects de culture scientifique. C’est une faiblesse qui limite notre capacité de citoyens au moment où nous avons des décisions collectives à prendre.
Cette décision du CSS de Sorel-Tracy ne remet pas en question l’engagement de ses équipes à transmettre à ses élèves le meilleur enseignement possible pour leur réussite. Je leur fais confiance.
Mais je suis triste en constatant cette occasion manquée.